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Auteur Sujet: Comment avoir des accidents en plongée (retex - long)  (Lu 1745 fois)

07 mars 2023 à 00:26:15
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Khee Nok


Résumé: en allant plonger (SCUBA) on a fait pratiquement toutes les erreurs possible, sans conséquences heureusement, et ça a été une leçon (pas juste pour la plongée).


Ma moitié et moi sommes jadis allés plonger dans un coin assez reculé au sud de la Thaïlande, Ko Lipe, juste au nord de la frontière malaise.

C’étaient les années 90, c'était hors des sentiers battus, je savais juste qu’il devait exister un club de plongée sur l’ile puisqu’il avait un vague site internet mais injoignable.

Après quelques heures de bateau on arrive sur place, un coin assez désert, bien « roots » avec juste quelques bungalows en bord de plage . Et on découvre que le club en question, tenu par un Canadien arrivé là dieu sait comment, existe bel et bien. Lui, sa barcasse et ses équipements de plongée, avaient visiblement connu des jours meilleurs.

On plonge avec, de toute façon c’est pas comme s’il y avait beaucoup d’autres choses à faire ou de la concurrence.

Je m’étais quand même renseigné sur son plan en cas de soucis et c‘était assez rocambolesque : il avait sur sa barque une radio type CB, avec laquelle il devait appeler son acolyte resté au centre de plongée, lequel acolyte devait alors franchir un petit bras de mer de pour aller sur l’ile d’en face, Ko Adang, et en grimpant sur la colline il pouvait chopper un signal GSM de Langkawi en Malaisie et appeler les secours. Avec deux options : soit on avait montré l’assurance/CB qui va bien et il appelait un hélico qui vous emmenait dans un centre bien équipé (il y a dans le sud de la Thaïlande des plateformes pétrolières donc des infrastructures pour plongeurs pros), soit c’était le bateau qui vous amène au port (environ 50 km de mer) d’où on vous amène à l’hosto en question (qui n’est pas juste à côté)…

Un jour on part, pour une fois avec un autre couple de plongeurs, faire une sortie à la journée, un peu plus loin que d’habitude.

La plongée du matin sans souci, puis on déjeune, sauf le plongeur de l’autre binôme qui ne mangeait pas de porc mais avait oublié de prévenir avant.

L’après-midi, plongé dérivante : l’idée est de se laisser porter par un courant dans un chenal entre deux îles, peinards, et arrivés au bout on se signale et la barque vient nous chercher, voire elle nous suit en repérant les bulles en surface.

On part tous ensembles, chaque couple en binôme plus l’accompagnateur, le pilote reste sur la barque.

Assez vite le gars qui était à jeun signale par gestes qu’il a froid et qu’il va remonter. Le guide de plongée lui dit OK et continue avec la copine du gars, le mec remonte seul à la surface.

On finit notre plongée, on remonte. On voit que la barque n’a pas bougé d’un pouce. On se signale (boudins gonflables oranges, sifflets etc). Rien. Le pilote de la barcasse fait des signes mais ne vient pas.

On comprend qu’il a un problème et on rejoint péniblement la barque à la nage, à contre-courant, on arrive bien vannés et le pilote nous explique son moteur est en rade.

C'est embêtant mais on a un autre souci : on a perdu le plongeur qui avait quitté le groupe.

Evidemment c’est le stress, surtout pour la copine du type. Il a dû remonter, la barque ne l’a pas vu, et fatigué il n’a pas pu remonter le courant. On dit à sa copine qu’il a certainement rejoint le bord (en espérant qu’il ne soit pas déjà au large). Faute de moteur on décide donc de se laisser dériver aussi.

Et coup de bol on finit par apercevoir une tache blanche sur une des côtes de ce chenal. On choppe une bouteille de flotte, on se met à l’eau, on nage, c’est bien lui ! Le scénario optimiste était le bon : fatigué, il n’avait pas pu rejoindre la barque et avait nagé jusqu’au bord, en pensant que le moment venu on prendrait la barque et qu’en longeant le chenal on le retrouverait.

Reste qu’on était encore plus éloignés de notre point de départ, toujours sans moteur. Quand à joindre le centre de plongée par radio, tintin, entre la distance et les îles faisant obstacles il était injoignable.

Solution : rester là. Nous devions rentrer en fin d’après-midi, le soir nous serions portés manquants, et sachant notre destination ils enverraient un bateau nous chercher mais pas avant le lendemain, il avaient juste des barques et ne naviguaient pas de nuit.

Quant à espérer héler un bateau… c’est le détroit de Malacca mais les navires passent bien plus au large, le coin est assez paumé et peu fréquenté, d’autant que c’est officiellement une réserve naturelle (même si ça ne semblait pas trop dissuader les pêcheurs).

On se prépare donc à y passer le reste de la journée et la nuit, ce qui n’était pas trop problématique en climat tropical, avec les serviettes de bain en guise de couverture.

Les dames font leur bronzing, on papote etc. Et puis coup de bol ! Voilà que passe un petit chalutier, sans doute des birmans qui viennent pêcher illégalement dans les eaux thaïlandaises en soudoyant les garde-côtes (et les affrontements entre pêcheurs birmans et thaïlandais faisaient régulièrement des morts).

On fait des grands signes, il nous remarque, s’approche. Sauvés !

Et là je ne sais plus si c’est le guide de pêche ou le pilote de la barque que l’on voit virer au vert.

Qui nous explique : on est au fin fond de nulle part avec deux jeunes femmes à bord, en bikini. Sur ce chalutier il y a une bande de types des plus rustiques voire violents, qui sont en mer depuis des semaines…

Les dames se couvrent précipitamment, le chalutier nous accoste, gros moment de tension de notre côté… et tout se passe bien, solidarité des gens de mers, ils nous passent des câbles pour redémarrer le moteur, on leur achète du poisson, e la nave va, on serre les fesses pour que le moteur ne cale pas sur la route du retour et tout finit bien.

Moralité:

- J’avais vraiment déconné en amenant ma femme là-dedans et on a eu de la chance. Le seul moment où on n’a pas fait n’importe quoi c’est pour récupérer la brebis égarée. Pour le reste, pratiquement à chaque occasion on a pris la mauvaise décision.

- On n’aurait jamais dû commencer de plonger dans ces conditions. Je savais que la plongée est un sport qui comporte des risques. En plus, le matériel était moins que moyen, et le plan de secours fantaisiste, autant dire inexistant. On aurait eu un vrai accident de plongée c’était la catastrophe assurée. Et nous n’aurions pas délibérément choisi d’aller plonger avec du matos de m*rde dans ces conditions. Mais une fois qu’on était sur place (après un voyage long et lui-même limite pour la partie navale) on a choisi d’ignorer le risque parce que sinon il aurait fallu renoncer à une partie de ce pourquoi on était venus (et ça aurait été la bonne décision). Problème du « creeping commitment ». Alors que quand ça pue ben faut juste ne pas y aller, ou partir.

- Un facteur qui a sans doute contribué est que non seulement j’étais jeune et con (maintenant ça va je suis moins jeune) mais que j’avais vécu des années en Thaïlande. Donc le côté n’importe quoi me choquait moins, et je considérais sans doute que « je pouvais gérer » (alors que la mer et le moteur s’en foutaient que je parle thaï ou non). La familiarité avec un certain environnement n’est pas forcément un plus en terme de sécurité si ça conduit à la négligence.

- Il faut revoir les plans avec l’organisateur de toute activité même s’il est censé savoir mieux. Par exemple juste faire une plongée dérivante (vers le large) à la merci d’une barcasse censée nous récupérer à temps était de toute façon n’importe quoi. On aurait assez facilement pu finir dérivant dans le détroit de Malacca, au mieux repêchés transis de froid, au pire bouffés par les requins tigres.

- S’il y a des procédures/consignes de sécurité c’est pas pour rien (on ne plonge pas le ventre vide, on ne  laisse pas un plongeur tout seul, etc). Ça permet justement d’éviter de devoir réfléchir… et prendre la mauvaise décision.

- Les emmerdes volent en escadrille.


 


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