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Stages de survie CEETS

Auteur Sujet: Retex : Quand on connait son agresseur  (Lu 4438 fois)

10 décembre 2021 à 17:22:24
Lu 4438 fois

mandragore


Je suis une lectrice silencieuse de ce forum depuis des années et franchement merci pour tout ce contenu, ces conseils, j'ai beaucoup appris, réfléchi, évolué grâce à vous tous. Je me dis qu'il est peut-être temps que j'y contribue aussi peut être à ma petite échelle. C'est un peu égoïste de ma part de profiter de tous vos retex, sans partager les miens  :D

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Ce qui m'a aussi décidé à partager mon expérience, c'est qu'après des années d'hésitation, j'ai fini par franchir la porte d'abord d'une initiation à la self défense féminine du centre social du coin, puis par m'inscrire au club de Krav-maga de notre instructeur. Et je me suis rendue compte que comme dans les films où la damoiselle en détresse est agressée dans une ruelle sombre par un méchant cagoulé, on travaille a priori très majoritairement des scénarios où on se fait agresser par un inconnu et où finalement l'agresseur est clairement défini comme l'agresseur. Lui c'est le méchant, nous on est les gentils, on se protège, on se défend. C'est "simple", c'est noir ou blanc. Mais je ne peux pas m'empêcher de me poser la question du comment on peut se préparer aux zones plus grises de la vie réelle ?


Parce que moi, je connaissais mon agresseur. Ca faisait plusieurs mois que je le croisais au boulot, qu'on discutait ensemble. Un mec tout ce qu'il y avait de plus agréable. Il m'a invité à aller boire un verre et j'ai dit oui, la vie normale quoi.

Je n'ai pas bu d'alcool car je conduisais, il a pris deux bières. Y'a aucune drogue qui a été versée dans mon verre. On a passé une super soirée ensemble, on a discuté, refait le monde, joué au billard, flirté. Sincèrement c'est le type d'homme que j'aurais rappelé, à qui j'aurais proposé une autre soirée, avec qui j'aurais pu aller plus loin, dont j'aurais pu tomber amoureuse.

On sort du bar, il pleut. Il est venu à pied (même s'il a une voiture) et il habite loin alors j'ai pitié de lui et je lui propose de le raccompagner en voiture jusque chez lui. Mais je pose le cadre direct "on a passé une soirée très agréable ensemble, mais même si je le raccompagne, pas la peine d'avoir une idée derrière la tête, je ne coucherais pas avec lui comme ça dès le premier soir". Il acquiesce "pas de problème, t'inquiète, on est sur la même longueur d'onde".

En bas de chez lui, il me propose de monter, juste pour boire un dernier verre, continuer à discuter. Idem, je lui dis que je ne suis pas dupe, que je sais bien ce qu'il cherche et que non, je ne finirais pas dans son lit ce soir. On a passé une bonne soirée, on se reverra surement, mais là je vais rentrer. Il me sort l'argument ultime "pour qui tu me prends, je vais pas te sauter dessus, je vais pas te violer non plus. Non, je veux juste faire durer un peu plus cette soirée parce qu'on a passé un très bon moment ensemble. On peut quand même continuer à discuter autour d'un verre entre gens civilisés.". J'hésite. J'accepte. Je pense à tous mes amis hommes, gentlemen, adorables, avec qui je peux passer une soirée seule sans qu'il se passe quoique ce soit, avec qui même j'ai parfois dormi sur le même matelas (en tournée) sans que ça aille plus loin. J'accepte de lui faire confiance, parce que je leur fais confiance à eux.

Dès que j'ai mis un pied dans son appartement, j'ai su. Il y avait un truc qui clochait. Absolument chaque fibre de mon corps me disait "reste pas là, barre toi". Mon instinct a compris avant moi, mais je ne l'ai pas écouté, j'ai utilisé ma raison contre lui. Je lui ai dit de se taire "arrête ta parano, tu veux quoi, finir nonne ?!". Ma première erreur.

Dans l'appartement, il n'y avait absolument aucun meuble, aucune déco, rien absolument rien. Juste un matelas posé à même le sol au milieu de la pièce, un vieux carton avec un ordi dessus et c'est tout.

Sans rien dire il a fermé la porte à clé derrière moi, il a fermé tous les volets. Je me suis sentie piégée mais j'ai tenté de rationaliser ("il rentre du boulot, il ferme tout comme il le fait peut être tous les soirs en rentrant, y'a des gens comme ça"). Il m'a demandé de retirer mes chaussures. C'est un détail anecdotique, un truc facilement explicable pour "pas salir" mais je me suis sentie encore plus vulnérable sans mes chaussures, comme si mentalement j'étais encore plus prise au piège, incapable de fuir. Mon instinct continuait de me dire qu'il fallait que je parte, et je continuais à essayer de rationaliser.

Je me suis assise sur le matelas posé au sol, parce qu'il n'y avait nulle part ailleurs où s'asseoir. Il m'a demandé ce que je voulais boire et a disparu dans la cuisine.

Il est revenu dans la pièce les mains vides. Je n'ai jamais eu mon verre et je ne suis pas sûre qu'il ait eu réellement l'intention finalement de me servir à boire. Une autre alarme silencieuse s'est allumée quelquepart dans mon cerveau quand je l'ai vu revenir sans rien. Quelquechose cloche.

Et puis, je sais pas...

Y'a un grand trou noir dans ma mémoire. Je n'arrive même pas à savoir combien de temps il me manque dans le fil des évènements. Je n'ai pas l'impression qu'il se soit écoulé plus de 1 ou 2min mais ça pourrait être 5 ou 10min aussi. Aucune idée, le disque dur a été effacé.

Dans l'image d'après, je suis couchée sur le matelas, il est sur moi, me tient les poignets. Plus j'essaie de me dégager, plus il me tient fort, plus il pèse de tout son poids sur moi.
Je me dis que c'est un malentendu, que si je lui explique clairement, il va comprendre. Alors, je lui redis encore et encore "arrête, je ne veux pas, lâche moi, je t'ai dit que je ne voulais pas coucher avec toi". Au début il me répond sans me lâcher pour autant "Fais pas la prude, tu sais que t'en as envie, laisse-toi faire". Puis très vite il ne me répond même plus, il est juste dans l'action. Et moi... je continue à argumenter, négocier parce que ça me semble tellement inconcevable que cet homme avec qui je discutais encore il y a une demi-heure, que cet homme qui était si sympa et attentionné ne puisse pas comprendre ce que je suis en train de dire. Peut-être aussi parce que c'est le coeur de mon métier d'expliquer, de parler et qu'il m'est arrivé bien des fois de réussir la désescalade d'une situation très tendue, voire agressive rien qu'avec des mots. C'est sûr, si je lui explique, il va comprendre, il va arrêter.Mais non.

Et là, je réalise. C'est réellement en train de se passer. Il est déjà en moi. Il m'a retiré ma petite culotte et il est en train de me violer.

Mon cerveau bloque. Ca a tellement aucun sens, aucune logique, aucune rationalité. Je n'arrive pas à associer les deux images, je n'arrive plus à comprendre qui j'ai en face de moi. L'homme gentil, génial, en qui j'avais confiance, est devenu un agresseur, mon violeur. Mon cerveau ne sait pas quoi faire de tout ça alors... il m'abandonne. J'ai vraiment l'impression que quelqu'un a arraché la prise de courant, et que mon cerveau s'est fait la malle en me laissant toute seule là. Désolé, mais moi je suis dépassé, je me barre.


Dans les discussions entre amis j'entends souvent mes copines me dirent qu'elles, elles ne sont pas du genre à se laisser faire, qu'elles ont trop de caractère pour se soumettre, qu'elles ne sont pas des victimes et qu'elles se débattraient sacrément et jusqu'au bout. Moi aussi, je le pensais et même je le disais. Et en vrai, je suis quelqu'un qui ne se laisse pas faire, j'ai déjà vécu d'autres situations très tendues y compris une agression où j'ai réussi à faire face et même à être celle qui prend les choses en main. Mais là, ce n'est plus moi aux commandes. Je ne suis plus capable de bouger, de parler, ni même de réfléchir. Je ne suis plus là. J'ai l'impression que la personne que j'étais est juste devenue minuscule et tente de se cacher dans un tout petit recoin de mon corps. Et elle me répète "ne bouge pas, ne respire même pas, sois comme morte et ça passera plus vite". C'est quelquechose de fou, car jamais consciemment je n'accepterais un jour de me dire ça, et à cet instant là, pourtant y'a plus que ça. Je suis juste comme morte.


Et puis, je ne sais pas pourquoi ni comment, mais à un moment je réalise qu'il n'a pas de préservatif. Je ne sais pas si c'est parce que je suis de la génération sida et qu'on m'a rabaché toute ma jeunesse le "sortez couvert". Mais ce petit détail rallume la lumière, on a rebranché la prise, je retrouve mon cerveau. Une part de moi s'écrie "déjà qu'il me viole, mais sans préservatif, alors là pas question !".

Alors je me débats beaucoup plus fort cette fois. Je pense qu'il ne s'y attendait plus, qu'il était persuadé que je n'essayerais plus de m'échapper, que c'était gagné "j'étais à lui", parce qu'il avait un peu relâché son étreinte et finalement avec l'effet de surprise j'arrive à me dégager sans trop de difficulté. Le temps qu'il comprenne, je me suis déjà mise à courir, je me sauve dans le couloir, il tente de me rattrapper mais s'arrête à la porte de son appartement. La peur que je crie et réveille ses voisins ? Aucune idée, je sais juste que j'ai dévalé les escaliers, j'ai sauté dans ma voiture, et je me suis enfermée chez moi.

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Je ne sais pas si mon expérience peut aider d'autres à mieux se préparer ou mieux se défendre. Personnellement, ça m'a surtout appris à faire confiance à mon instinct et à l'écouter.

J'ai aussi retenu que la force du conditionnement pouvait parfois être la seule chose qui reste quand la raison est dépassée. Ici ça m'a en même temps aidé et desservie. Aidée car c'est ce qui m'a permis de sortir de l'état de sidération, desservie parce que quelque part j'ai aussi été conditionnée à n'avoir peur et à me méfier que "des inconnus dans les ruelles sombres". D'ailleurs, de la même façon combien d'homme ne voit derrière le terme "violeur" que le type cagoulé et armé qui traine dans les parkings souterrains et ne se rendent pas compte qu'ils sont eux aussi des violeurs même sans cagoule, quand ils forcent leur petite amie ?

Je n'ai jamais appris que l'agression pouvait venir d'une personne en qui j'avais confiance. Je n'ai jamais appris à me protéger et à me défendre (en déployant toute ma détermination et mon agressivité) de quelqu'un que je connais, que mon intégrité physique et mentale est plus importante qu'un lien social ou affectif. Je trouve ça compliqué, j'imagine qu'il est normal d'hésiter, d'avoir peur de blesser physiquement ou même affectivement quelqu'un quand ce n'est pas un inconnu, quand on a un lien avec lui. Alors je me demande comment vous gérer ou vous géreriez ce paramètre ?


Merci en tout cas de m'avoir lu.

10 décembre 2021 à 17:34:14
Réponse #1

AFA


Salut. Pas de réponse intelligente à partager, juste te dire d’être humain a être humain toute mon empathie

Je ne sais pas si te dire merci du partage n'est pas indécent, mais c'est l'idée.

10 décembre 2021 à 18:34:24
Réponse #2

JeromeSud


Bonjour Madame,

Votre témoignage est édifiant, avez vous porté plainte ? vous n'avez pas mentionné cet aspect dans le récit, pourtant il est essentiel, à plus forte raison pour le retour d'expérience à même d'aider/conseiller les personnes sur la conduite à tenir.

Le cas échéant la parfaite connaissance de l'identité du coupable doit grandement faciliter l'enquête.
Des prises de sang (recherche de drogues GHB) ainsi que des prélèvements immédiats (ADN) après la commission de ce viol sont très importants pour instruire le dossier.

Bien à vous
Jérôme
Un héros, c'est juste un abruti qui a eu de la chance.

11 décembre 2021 à 09:36:19
Réponse #3

bison solitaire


Ce témoignage est précieux voire capital; il mériterait d'être diffusé sur les réseaux sociaux professionnels...

11 décembre 2021 à 19:15:24
Réponse #4

joelpenicaud


Bonjour,
Avant tout, je vous crois et il avait pas le droit.

Moi aussi je suis un lecteur silencieux et j'ai cherché un truc intelligent à amener !

Alors j'ai une source que je partage sur cette question, une brochure d'une association belge d'auto défense féministe en liens avec Irène Zeilinger
(Voir protegor ici : https://www.protegor.net/blog/irene-zeilinger-formatrice-dauto-defense-feministe/ )

Cette brochure est une version plus accessible de "Non, c'est non !"  réduite à 50 pages... Bref, je trouve que c'est en phase avec le sujet, alors la voici :
http://www.garance.be/spip.php?article881

Et dans le doute pour les acharné.e.s de la lecture "Non, c'est non" : http://www.garance.be/spip.php?article76
Et pour les plus réfractaires, mais qui aiment le format BD, une lecture du texte précédent fait par le "projet crocodiles" : https://projetcrocodiles.tumblr.com/post/78830110539/le-site-hollaback-clic-avec-sa-page-comment/amp

Et j'aime aussi votre point de vue sur l'instinct, je le rapproche du post de Jaddo sur l'alarme bidale :
http://www.jaddo.fr/2014/02/08/e-a-u/
Rien que d'y repenser j'ai envie de pleurer et je crois bien que j'ai les yeux humides malgré mon conditionnement d'homme.

D'ailleurs, le conditionnement est un autre point important, sur cette question de la sécurité personnelle beaucoup de femmes que je connais ont la conviction qu'à cause de la différence de force physique entre hommes et femmes, tout combat est hors de question pour elles. C'est un conditionnement.
J'aimerais citer un kraviste philosophe :
"J’ai fait l’expérience d’un combat " légèrement appuyé " avec deux femmes (niveau technique équivalent entre nous)….Je suis formel : Une Pénélope a le pouvoir destructif d’un Ulysse. Pour la petite histoire, j’ai même failli me faire mettre KO. Depuis, je sais, dans ma chair, à travers ces douloureuses expériences (j’ai encore du mal à en parler ), qu’une femme et un homme en art martial c’est …. kif-kif."
Si vous souhaitez lire l'intégralité de la publication c'est ici : http://krav-philo.over-blog.com/article-les-femmes-et-les-hommes-au-krav-maga-111064184.html

Enfin, la seule question qui est posée à la communauté en fin de post est : Comment se protéger contre une personne avec qui on a un lien affectif ?

Peut-être en posant ses limites ? Et en  s'énervant d'une saine et juste colère si elles sont franchies ? Mais ça suppose d'avoir dépassé beaucoup de conditionnements...
Alors peut être en arrivant à se convaincre qu'on est assez important pour exister, que rien ne nous subordonne à autrui ? Mais c'est un peu compliqué...
Heu, et si on prenait exemple sur un chat ? C'est petit et mignon un chat, et gobalement asexué. Lorsque un chat veux de l'affection, vous le savez rapidement... mais lorsque vous le dérangez, vous le savez vite également !
Et si vous outrepassez son avertissement, le chat fera en sorte d'être plus clair et le souvenir sera cuisant... Ils en ont rien à cirer de la différence de force physique !

Alors c'est ce que j'ai de mieux à offrir, prenez exemple sur les chats...
Et pas qu'en cas de danger. Ça marche pour tout : faim, sommeil, affection, tranquilité... Demandez, puis demandez encore mais plus fort et enfin sortez vos griffes !

J'espère que c'est pas trop long où hors charte...

11 décembre 2021 à 19:18:51
Réponse #5

VieuxMora


Respect et compassion Madame.

11 décembre 2021 à 19:54:30
Réponse #6

DavidManise


Bonsoir,

Merci Mandragore pour ce témoignage qui m'a l'air d'avoir été bien compris, digéré, travaillé sur un plan perso...  Je sens dans ce post une envie de témoigner pour que ça n'arrive pas aux autres.  Pour leur éviter de vivre ça. Est-ce que j'ai raison ?

Est-ce qu'un conseil général -- basique et pragmatique, au delà de l'empathie que je ressens -- pourrait être déjà retiré de ce post, sous la forme "écoute ton instinct" ?

On imagine souvent, dans les scénari de self-défense, le violeur dans une ruelle sombre.  Or, les faits démontrent que c'est très rarement un inconnu. Deuxième point important à souligner AMHA.

Merci à tous d'être ultra respectueux sur ce fil, et face à ce genre de témoignage. 

David
"Ici, on n'est pas (que) sur Internet."

Stages survie CEETS - Page de liens a moi que j'aimeu

12 décembre 2021 à 10:33:57
Réponse #7

Lamagiciennedauz


Je suis aussi une lectrice assidue (plutôt) silencieuse, et je sors de mon silence pour te saluer. J’ai l’immense chance de n’avoir jamais été confrontée à ce problème, ni même à des prémices, mais te lire me touche au plus profond. J’ai tellement de femmes autour de moi qui sont passées par là….

Je comprend tout à fait la problématique du mec qu’on étiquette « normal » parce qu’on le rencontre dans des situations qui ne laissent pas la place au doute. Et puis les circonstances changent, et il est très ardu de faire évoluer l’opinion qu’on s’est forgée en temps réel.
Je perçois en te lisant le tiraillement entre « il insiste lourdement c’est bizarre » et l’aspect très raisonnable de son discours où tu te dis qu’il n’est pas légitime de lui appliquer brutalement une fin de non recevoir « juste » parce que c’est un homme. Un genre de dissociation entre ton instinct et ta raison intellectuelle.

Je ne sais pas de quand date ce moment dans ton histoire. J’espère que cet écrit peut avoir une valeur libératrice pour toi. J’espère aussi que tu as pu être écoutée et épaulée par ton entourage proche, à défaut par ton médecin.
Même des années après, être entendue est souvent nécessaire à la cicatrisation. Moi je t’ai entendue, tu as toute mon attention et mon empathie, et je me permets de t’embrasser tendrement à défaut de pouvoir te serrer dans mes bras.


La magicienne.
C'est pas parce que c'est grave qu'il faut sombrer dans la gravité !

12 décembre 2021 à 19:39:55
Réponse #8

Jean-Yves


Merci Mandragore pour ton témoignage courageux et ton analyse détaillée.

Ce que j'en retiens :

1. La technique du pied dans la porte est toujours très efficace, que ce soit pour une cause acceptable (un sondage de satisfaction en 2 questions qui se transforme en enquête client de 20 minutes) ou pour une agression comme ici.

Savoir que cette technique existe peut aider à comprendre pourquoi, soudainement, on ressent un malaise alors que la énième petite demande est une petite demande de rien du tout. Ça peut aider à dire stop. Même si on est bien élevé-e et qu'on se sent bête/injuste/etc.

2. Apprendre à écouter son instinct. Cette alarme qu'on ressent très clairement dans les trippes. Elle ne ment jamais. Évidemment on est conditionnés à être "rationnels" (ne serait-ce qu'au quotidien au travail) mais on doit réapprendre à l'écouter.

3. Accepter que les agresseurs ont des techniques TRÈS bien rôdées, comme les experts du marketing, et ne pas s'en vouloir de s'être fait avoir.

12 décembre 2021 à 21:21:51
Réponse #9

b@s


merci du témoignage poignant et précieux

on parle d'écouter son instinct, la dernière fois que je l'ai fait, il n'y avait en fait aucun problème et je suis probablement passé pour un abruti ou un pisse froid, voire pire.  :lol:
Justement, je peux donc témoigner qu'on s'en remet très très bien, beaucoup mieux je pense que de pas l'écouter et de voir la m*rde heurter le ventilo...

l'instinct, ça s'aiguise, c'est pas infaillible, mais bon les garanties, le grille pain, toussa

malheureusement dans ton cas, des conséquences bien difficiles, mais  le seul fautif est celui qui t'a agressé.




13 décembre 2021 à 12:06:26
Réponse #10

Shirokuma


Personnellement, ça m'a surtout appris à faire confiance à mon instinct et à l'écouter.
Grand Merci pour ce témoignage poignant.
Pour ces mûres réflexions. 
Il y a énormément à retenir et à apprendre de votre expérience.

Chapeau bas.  :akhbar:
“L'expérience est une bougie qui n'éclaire que celui qui la porte.” Confucius

13 décembre 2021 à 13:47:59
Réponse #11

Petit à petit


Merci Mandragore. Outre que tu parais avoir, malgré le sidération et le scabreux de la situation, réagir le mieux qu'il était possible dans cette situation et dans l'état mental où tu te trouvais, le récit que tu en fais à postériori est une véritable leçon, une remarquable analyse et peut servir à toute personne se trouvant agressée sans pouvoir tout de suite être sûre qu'il y a agression, parce qu'elle a une certaine familiarité avec l'agresseur. A fortiori, si il y a un lien affectif avec l'agresseur, on est affaibli.

Sans doute face à ce genre de situation, il faut réagir le plus tôt possible. Ce qui demande un apprentissage. L'appréhension juste de la situation, tu l'as manifestement. Ce qu'il faut travailler, c'est l'action. Savoir agir le plus tôt et le plus vite possible et le plus efficacement. D'autres ont donné, plus haut, des éléments de réponse très pertinents.

En tout cas, merci et félicitations. Et de tout coeur avec toi. Respect :up:
Caché en évidence

13 décembre 2021 à 16:21:31
Réponse #12

mandragore


Merci à vous tous, pour votre bienveillance mais aussi pour vos pistes de réflexion.

Je voulais préciser que si je partage aujourd'hui mon expérience, c'est que je me sens capable et prête à le faire. C'est arrivé il y a plus de 10 ans, donc j'ai pu travailler dessus et c'est plus facile pour moi d'en parler avec un certain recul.

J'ai toujours énormément apprécié le pragmatisme de vos conseils. Je n'ai pas vraiment appris sur ce forum à survivre à une apocalypse zombie mais je range mon téléphone quand je prends le volant histoire qu'il ne vole pas dans l'habitacle en cas d'accident (ça peut servir lol), et j'entends souvent la douce voix de davidmanise dans ma tête me dire "3 secondes de connerie". Alors, si ça peut aider un jour quelqu'un d'entendre ma voix lui dire dans sa tête "écoute ton instinct", "sors tes griffes comme un chat", ou permettre à d'autres de réfléchir à comment réagir non pas seulement à une apocalypse zombie ou à l'agression de 10 hommes dans un parking souterrain mais aussi à une agression dans la sphère intime, ça aura été utile.

En tout cas encore merci pour vos conseils et pistes de réflexions. Je connaissais le travail de garance mais j'avoue que ça faisait un bout de temps que je ne m'étais pas replongée dedans donc merci pour la piqûre de rappel. Ils évoquent d'ailleurs le fait de prononcer le mot "viol" et c'est vraiment une des choses dont je me dis que "si c'était à refaire", je tenterais. Juste poser le cadre, poser le mot, dire "là je t'ai dit plusieurs fois non, si tu continues, ça s'appelle un viol". C'est plus facile à dire qu'à faire car j'étais je pense aussi dans une forme de déni face à quelque chose d'aussi inconcevable. Je ne sais pas du tout si ça aurait changé le cours des choses, mais ça me semble être un bon conseil autant pour que l'agresseur ne puisse pas se dédouaner en mode "j'avais pas compris", autant pour soi je crois, pour justement plus vite comprendre les réels tenants et aboutissants, sortir du déni et s'accorder le droit de passer à l'action.

L'analogie aussi du pied dans la porte est édifiante. J'avais déjà entendu parlé de ce procédé commercial mais je n'avais pas fait le rapprochement. Pourtant quand je repense à la chronologie des événements, c'est assez frappant. Et au delà de çà, travaillant avec des jeunes (élémentaires, collégiens, lycéens et jeunes majeurs) et notamment sur tout l'aspect prévention autour des réseaux sociaux, j'ai regardé il n'y a pas longtemps le documentaire sur BrutX "Caught in the net" (attention c'est le genre de documentaire qui donne envie de frapper des gens même si on est très pacifique à la base) et c'est fou comme tu retrouves exactement le même mécanisme.

Et en vous relisant et en réfléchissant de mon côté, ça m'a aussi fait penser à cette histoire d'écouter son instinct. C'est vrai que parfois, notre peur peut être totalement irrationnelle et déplacée. Après cette expérience, je ne me suis pas mise à avoir systématiquement peur de tous les hommes que je croisais dans la rue.
Mais par contre, ressentir de la peur ou un immense malaise face à quelqu'un qu'on connaît et à qui normalement on fait confiance, c'est pas vraiment logique.
Ça rejoint un peu l'idée de quelqu'un sur ce forum qui apprend à ses enfants à se défendre uniquement quand ils ressentent de la peur, et pas juste parce qu'ils sont en colère. La peur face à quelqu'un qu'on aime, apprécie, à qui on fait confiance, c'est un vrai signal d'alarme à écouter. 

Merci encore pour toutes ces réponses qui font avancer.

@JeromeSud Je n'ai pas parlé du après car le post était déjà long, mais je peux le faire si besoin. Je ne suis pas forcément un exemple de ce qu'il faut faire (je n'ai notamment pas porté plainte), mais je peux parfaitement expliquer ce qui s'est joué dans ma tête après. :-) Je n'ai pas le temps de le faire tout de suite, mais je prendrais le temps cette semaine.

13 décembre 2021 à 22:46:44
Réponse #13

Lorka-85


Il n'ai pas trop tard pour porté plainte, peu être que c'est un habitué des faits niveau casier judicaire, cela renforcera ton témoignage.
ça me semble important pour se reconstruire.
Après il plaidera certainement le consentement après peu être avoir nié au début, le chemin peu être long.
Je ne sais pas si tu le revois dans d'autre cadre forcés (professionnel, etc)

Dans ton cas de figure et cette situation, je suis pas forcement sur que se défendre sois la meilleurs idées, avec la porte fermé à clé, milieu clos sans témoins,  gabarit moindre, peu être que les couteaux de cuisines auraient pu faire un drame...

Bonne reconstruction à toi, merci de ce courage d'avoir témoigné !

13 décembre 2021 à 23:12:27
Réponse #14

bpc


Mais par contre, ressentir de la peur ou un immense malaise face à quelqu'un qu'on connaît et à qui normalement on fait confiance, c'est pas vraiment logique.

En fait si.
L'évolution nous a léguée un système de survie, dont une part gère l'agression physique.

La peur allume ce système.
Mais il peut aussi être utilisé consciemment.

Ce système ne juge pas, c'est pourquoi ta relation a l'agresseur ne l'intéresse pas.

Il t'averti et sa réponse physique est autonome, si on le laisse faire.

Notre culture ne nous l'apprend pas.
Au contraire, on nous apprend a vouloir garder le contrôle, empêchant ainsi le système de travailler.

C'est à portée de main, mais c'est beaucoup de travail pour un adulte.
Un peu comme s'il fallait attendre l'âge adulte pour se mettre à apprendre à marcher.


16 décembre 2021 à 11:30:20
Réponse #15

Merlin06


J'ai lu, et puis j'ai réfléchi et puis les copains ont écrit plein de choses intéressantes et puis j'ai quand même trouvé quelques mots à ajouter.

Tout d'abord merci d'avoir partagé ces douloureux évènements en détails et de manière factuelle. Ensuite bravo d'avoir réussi à te tirer de cette situation, il n'avait pas le droit, tu as bien fait de te défendre.

Je vais conseiller à chacun la lecture du livre de Gavin De Becker The Gift Of Fear/La peur qui vous sauve, qui apporte de nombreux éléments sur la violence et les éléments périphériques(jeu social, jeu physique, limites mentales/sociales, rôle des différentes parties du cerveau...), en particulier la peur et les violences faites aux femmes.
On en parle sur le forum ici: http://forum.davidmanise.com/index.php?topic=17884.0

PS: déposer plainte pourrait éviter une récidive, il ce serait bien le faire, si tu en sens l'envie et la capacité.
L'âme sûre ruse mal.
Le matin du grand soir il y aura de la confiture de bisounours au petit déjeuner.
Nous avons deux souverains, Dame Physique et Sire Temps.

 


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Bienveillance, n.f. : disposition affective d'une volonté qui vise le bien et le bonheur d'autrui. (Wikipedia).

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avec bienveillance, curiosité et un appétit pour le dialogue et la réflexion que l'interlocuteur peut susciter. »


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