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Auteur Sujet: [RetEx] PGHM de Chamonix Mont-Blanc, Miracle au Mont-Blanc !  (Lu 10533 fois)

13 août 2020 à 10:16:26
Lu 10533 fois

azur


Je viens de tomber sur ce RetEx du PGHM de Chamonix, publié sur Facebook, dont le premier épisode est particulièrement intéressant sur la réflexion préalable de l'organisation des secours

https://www.facebook.com/pghm.chamonixmontblanc/posts/1813267672175513?__tn__=K-R

Citer
épisode 1: une jonction dans la tourmente.

Histoire incroyable mais vraie. Le 21 juillet dernier, alors qu'ils rentraient d'une caravane terrestre au Mont Maudit déjà éprouvante, les « gars du PG » se sont lancés au secours d'une cordée de deux alpinistes britanniques qui venait de passer cinq jours dans la montagne, pour réaliser « l'intégrale de Peuterey ». L'un deux a chuté en crevasse mais en est ressorti. Il souffre de l'altitude, le fameux « Mal aigu des Montagnes ». Il n'avance plus et délire. La cordée se trouve au Mont-Blanc de Courmayeur, à 4750 mètres d'altitude ! Les orages arrivent. Si rien n'est fait, une nuit de plus en haute altitude serait fatale...

Retour sur une histoire qui s'est vraiment passée. Fred, chef de la caravane terrestre, témoigne avec pudeur et simplicité de ce que nos secouristes ont vécu. Merci à eux.

En ce début d'après-midi, alors que nous faisons sécher le matériel et les vêtements utilisés pour la caravane du Maudit, les éléments d’alerte pour le Mont Blanc de Courmayeur se précisent.
Finalement Stéphane, le patron, arrive à la drop zone et nous fait un point de situation. Le bureau (là où les alertes sont reçues et régulées) estime un engagement terrestre justifié mais, compte tenu de la situation (ce secours s’annonce long et difficile ; la caravane du matin a déjà éprouvé un peu les organismes) et du risque orageux avéré, Stéphane souhaite avoir notre ressenti de terrain.
Nous discutons de la situation et de la pertinence de l’engagement. Personnellement, je ne crois pas à la récupération de l’inconscient. Il me semble que cet avis est partagé par la plupart d’entre nous. Je prends la parole et résume l’opinion générale. Il nous parait justifié d’aller chercher le mieux portant qui ne pourra sûrement pas prendre tout seul la décision d’abandonner son compagnon de cordée. Pourtant, s’il ne le fait pas, il risque lui aussi de mourir. En revanche je pense qu’il faut être lucide et honnête avec les requérants et nous-même sur notre incapacité à ramener un inconscient depuis le Mt Blanc de Courmayeur. Il est donc clair et établi que, si le bilan se confirme, nous serons contraints de laisser l’alpiniste inconscient sur place. Cette décision est terrible mais fondamentale puisqu’elle définit précisément notre stratégie, rendant réalisable la mission et compatible avec le créneau météo imparti (les orages sont annoncés à 21h30).
C’est aussi très important car si nous sommes amenés à laisser effectivement l’inconscient au sommet, nous en aurons parlé avant sur la base d’arguments posés. En définissant la mission correctement et précisément, on sait quelle stratégie adopter et, de fait, quel matériel emporter.
L’engagement du « doc » ne nous semble pas justifié (le mieux portant semble pouvoir s’en passer) et, pour l’autre, il est sûrement trop tard. Des actes médicaux lourds (intubation) n’ont aucun sens ni aucune réalité dans ces circonstances.
Les matériels de bivouac pour nous (tentes, duvet etc...) ne sont pas emportés. La stratégie n’est pas d’y aller pour prendre l’orage avec eux mais c’est du pick and go.
Idem pour le matériel de brancardage. Aucune réalité envisageable sur les arêtes du Mont Blanc de Courmayeur et des bosses de neige et de glace en brancardant un inconscient, surtout par mauvais temps. Nous sortirions totalement de notre stratégie et serions très exposés aux orages et en danger dans nos déplacements ce qui serait susceptible de remettre en question la pertinence de notre engagement et notre sécurité.
Finalement nous convenons qu’une caravane à 4 secouristes sera suffisante, au moins dans un premier temps, pour faire ce qui est prévu.
Je demande donc qui est volontaire. Les mains se lèvent et je dois définir les équipes.
Romain et Matth sont désignés. Romain est très entraîné. Il est le plus fort d’entre nous physiquement et a fait plusieurs courses en altitude ces dernières semaines. Matth est aussi un élément très solide, efficace en toutes circonstances. Bien que rentrant récemment de vacances il n’a pas du tout subi la caravane du matin alors qu’il a fait le trajet le plus long.
Johann et moi seront également de la partie. Avec Johann, nous sommes sûrs de notre forme et de notre adaptation à l’altitude. Ensemble, le dimanche précédent, nous avons atteint le sommet du Mont-blanc depuis Bellevue en passant par l’aiguille de Bionnassay, non stop. Nous avons donc passé quelques heures en altitude... Par ailleurs nous avons ainsi parcouru l’arête des bosses et la descente au Goûter que nous devrons emprunter pour la caravane.
Bref l’équipe nous semble solide et nous sommes tous motivés.
Matth et Johann sont prêts les premiers. Ils seront déposés par Dragon en treuillage (nous avions pensé sauter de l'hélico à très basse altitude, le mécano a refusé) sur l’arête Nord du Dôme vers 4100m d’altitude.
Avec Romain, nous finissons les sacs. J’ai l’idée d’emporter une bouteille d’O2 et des lunettes (inhalateur à 02). Cette intuition sera assez déterminante pour la suite de la caravane... J’avais déjà pensé au préalable à la pertinence d’administrer de l’O2 aux victimes dans ce genre de caravane en très haute altitude. L’idée était d’utiliser du matériel d’himalayistes mais c’était resté à l’état de projet jusque maintenant.
On fera donc avec l'oxy de la dz, des gros « obus » de 5kg et des lunettes. Du coup, j’hésite. Je consulte Fabien qui me dit « prends-la, au pire tu la laisseras ». Le doc nous donnes une tablette de 6 comprimés de corticoïdes.
Nous sommes déposés au Plateau vers 4100m d’altitude grâce à un bloc de séracs écroulé que le pilote utilise comme référence. Pensée fugace pour le Sikorsky d’Henry et Vincendon crashé à quelques dizaines de mètres, forcément...
Nous arrivons sans encombre à l'abri Vallot. Johann et Matt sont derrière nous ; ils avaient plus de distance à parcourir pour atteindre Vallot depuis leur point de dépose.
La météo n’est pas fameuse mais on progresse « à vue », petit à petit.
Au départ de Vallot, le vent d’Ouest forcit brusquement et rend la montée pénible. Je me remémore l’effort fourni deux jours plus tôt avec Johann et maintes fois auparavant. Je demande à Romain de garder un rythme tranquille dans la première bosse qui est la plus raide et la plus coûteuse en énergie. Nous commençons à jalonner depuis Vallot pour faciliter la montée de la deuxième équipe et surtout pour préparer notre descente. À Vallot, nous appelons le bureau qui nous propose le renfort d’un troisième binôme qui acheminerait le caisson hyperbare jusqu'à l'abri. Ok pour nous, ça sera une aide précieuse. C’est Thomas et Matthieu R. qui viendront nous renforcer.
Nous atteignons le Mont Blanc dans le brouillard complet. Nous savons que nous sommes au sommet parce que ça arrête de monter... et entamons la descente sur l’arête du mont-blanc de Courmayeur.
Le vent fait tout givrer, on navigue au GPS pour être sûrs que nous sommes au bon endroit. Nous jalonnons toujours.
Nous sommes un peu surpris par la relative technicité de l’arête (passages en glace et un peu de « mixte », des rochers mêlés de neige et glace). Nous nous faisons la réflexion qu’il serait totalement impossible dans ce terrain de ramener un inconscient.
Nous arrivons enfin à un replat de l’arête et nous ne voyons qu’un sac à dos, une corde en tas et un piolet... pendant quelques instants nous sommes pris d’un doute (sont-ils partis ou, plus probablement, sont-ils tombés...). Finalement, nous voyons une tête dépasser du versant E de l’arête. Nous nous approchons du bord et découvrons la situation. Le mieux portant (Matt) a creusé une petite alcôve à mains nues et au piolet dans le flanc de l’arête pour y mettre son compagnon (Dan) à l’abri du vent. C’est assez efficace mais, sans pelle, l’alcôve est minimaliste et Dan a les jambes qui pendent dans le vide. La pente est raide, au delà de 45degrés. Romain m’assure et je descend au contact. Matt a l’air fatigué mais il est valide. Dan est très inquiétant et parle très difficilement, couché sur un karimat de bivouac. Mais il est conscient... selon Matt il a tenu des propos délirants les heures précédentes et après avoir chuté dans une roture il s’est plaint du dos et ses dernières forces l’ont abandonné. Le contour de la mission change quelque peu. Et s’il y avait un espoir ?

Au prochain épisode:
"Fred, I want to walk, let me try to walk !"
Restez avec nous, partagez!



Tout le monde savait que c'était impossible... est venu un idiot qui ne le savait pas, et qui l'a fait!
------------------------------------------
Boviner, c'est contourner par le centre...

13 août 2020 à 10:47:50
Réponse #1

greenman


Merci pour le partage, ça remet toujours les pieds sur terre ce type de récit.

Voici une vidéo sur la réalisation de ma cabane - http://vimeo.com/23283003

13 août 2020 à 19:22:41
Réponse #2

Nans


Ça force à l'humilité...

Vivement la suite  :up:

19 août 2020 à 00:57:16
Réponse #3

azur


Suite et fin: https://www.facebook.com/pghm.chamonixmontblanc/posts/1819123291589951?__tn__=K-R

Citer
épisode 2: “Fred, I want to walk. Let me try to walk”.

Histoire incroyable mais vraie. Le 21 juillet dernier, alors qu'ils rentraient d'une caravane terrestre au Mont Maudit déjà éprouvante, les « gars du PG » se sont lancés au secours d'une cordée de deux alpinistes britanniques qui venait de passer cinq jours dans la montagne, pour réaliser « l'intégrale de Peuterey ». L'un deux a chuté en crevasse mais en est ressorti. Il souffre de l'altitude, le fameux « Mal aigu des Montagnes ». Il n'avance plus et délire. La cordée se trouve au Mont-Blanc de Courmayeur, à 4750 mètres d'altitude ! Les orages arrivent. Si rien n'est fait, une nuit de plus en haute altitude serait fatale...

Retour sur une histoire qui s'est vraiment passée. Fred, chef de la caravane terrestre, témoigne avec pudeur et simplicité de ce que nos secouristes ont vécu. Merci à eux.

"Je donne à Dann les médicaments et lui installe les lunettes à oxygène, débit de O2 à 3l/min. Matt et Johann nous rejoignent. Eux aussi ont été surpris par la dernière section de l’arête ; ils nous ont même demandé confirmation de l’itinéraire à suivre.
Johann descend avec moi et nous creusons une alcôve plus “confortable” nous installons Dan qui est incapable de se mouvoir.
L’O2 et les médicaments commencent doucement à agir mais le seul signe d’évolution positive se manifeste sur l’élocution de Dan qui progresse légèrement.
Il est 19h00 le temps passe et les orages sont prévus dans 2h30...
Johann, Matt et Romain me rappellent notre objectif initial... Nous décidons de fixer une dead line à 19h15. Nous en informons le bureau qui s’apprêtait à nous inciter à partir. Les hélicoptères Dragon et CMBH sont en l’air pour la tentative de l’impossible. Nous entendrons Dragon lors d’une approche mais nous ne le verrons jamais. Les deux pilotes échangent par radio, ils s’entraident sur leur appréciation des conditions météo et finalement constatent que c’est impossible. Au moins, ces dernières tentatives fermeront la porte à tout doute si nous sommes amenés à laisser Dan sur place. Tout aura été tenté.
J’explique la situation au compagnon de Dan qui avait déjà été préparé à l’éventuel abandon de son compagnon lors des communications téléphoniques avec le bureau.
Dan retrouve peu à peu ses esprits. Je lui explique la situation. S’il est trop blessé et\ou malade pour marcher nous ne pourrons assurer ni sa sécurité ni la nôtre et nous devrons partir sans lui en espérant un créneau météo permettant son extraction en hélico.
A ses mots Dan me regarde et me dit : “Fred, I want to walk. Let me try to walk”.
Je l’aide à se relever. Je suis surpris qu’il tienne sur ses jambes. Romain me regarde avec incrédulité quand il le voit se redresser. Finalement, Dan monte sur mes épaules pour sortir de son alcôve. Il est hissé par les autres sur l’arête. En remontant je vois que ceux qui sont restés au vent sont tout givrés. À ce moment nous ressentons l’urgence de la situation. Si Dan doit marcher, cela sera long et difficile et les orages approchent. Nous refaisons les cordées. Johann et Matth prennent sur leur corde Matt qui a les yeux meurtris par le vent et le soleil. Ils nous feront le passage. Je m’encorde très court avec Dan, comme ça je garde la bouteille d’O2 dans mon sac (il en reste la moitié) et Dan marchera sous O2 en s’appuyant sur moi. Romain nous retient. Les premiers mètres sont encourageants même si nous craignons pour les passages techniques à venir. Effectivement, une fois dans ces passages, nous retenons notre souffle à plusieurs moments. Finalement nous parvenons à rejoindre le sommet du Mont Blanc. Dan est à bout et s’appuie de tout son poids sur nous. Nous échangeons les cordées car je ne suis plus un soutien efficace. L’O2 est terminée. Le troisième binôme est dans l’ascension des bosses. Nous les rejoignons à la seconde bosse. Leur aide est très appréciable dans les parties raides car Dan et même Matt tiennent difficilement sur leurs jambes. Matt ne voit plus rien avec le jour qui décline. Il perd la trace, titube, on se demande s’il s’endort en marchant. Dan ne parle pas, il marche comme un zombie. Nous arrivons à l’observatoire Vallot où une équipe d’ouvriers nous accueille très chaleureusement. C’est une première étape et nous commençons à y croire.
Thomas s’occupe de nourrir et d’hydrater tout le monde. Johann ne peut résister à l’appel du paquet de clopes d’un des ouvriers ! Thomas et Matt R mettent en place le caisson. Nous enlevons les vêtements trempés de Dan et l’installons dans le caisson. Nous pompons mais l’altimètre que Dan nous présente au hublot ne descend pas au dessous de 2700m : le caisson fuit... d’abord d’une soudure puis de toutes parts. Malheur ! Les ouvriers nous donnent du scotch de chantier. Ça limite la perte mais ça fuit encore. Nous parvenons en pompant quasiment en continu à maintenir une pression équivalente à 3000m mais de nouvelles fuites apparaissent sans cesse.
Nous appelons le bureau et le médecin pour discuter de la suite. Le médecin nous donne la conduite à tenir sur les médicaments.
Les orages sont finalement repoussés à 22h30. Le caisson fuit. Des guides se proposent de partir du refuge du Goûter pour aller à notre rencontre. Le caisson a malgré tout bien amélioré l’état de Dan qui commence à parler distinctement. Il parvient à boire et à s’alimenter un peu avec l’aide de Thomas.
Tout le monde est ok pour entamer la descente vers le refuge du Goûter où un caisson en bon état nous attend et où nous sommes à peu près sûrs de pouvoir gérer Dan si son état venait à se dégrader. Et puis, c’est 600m plus bas. Ça compte dans l’état où il est. Nous remettons des vêtements secs à Dan et Matt. Nous refaisons les cordées. J’équipe Dan avec mon masque et Matth en fait autant avec Matt qui a les yeux très abîmés. Nous nous mettons en route et descendons la pente vers le col du Dôme. Nous rendons compte de notre départ au bureau et les guides nous annoncent sur la fréquence radio qu’ils montent vers nous. Le bureau nous informe à ce moment-là que les prévisions météo ont changé. Les orages sont sur Sallanches et les Fiz et devraient arriver avant 23h00. Les guides prennent la communication radio. Cela leur confirme leur ressenti sur l’imminence de l’orage. Contrairement à nous, ils ont la vue sur les orages plus bas en vallée. Ils nous informent alors, logiquement, qu’ils rebroussent chemin. De notre côté, nous sommes conscients qu’il est trop tard, Dan ne remontera pas les 100m de dénivelé que nous venons de descendre et nous risquons de prendre l’orage avant d’avoir regagné Vallot. Nous décidons de poursuivre. La remontée au Dôme est extrême pour Dan et Matt qui sont à bout de force. Nous naviguons au GPS pour retrouver la trace sous le Dôme du Goûter. Nous connaissons cet endroit que nous avons tous déjà parcouru à de multiples reprises mais nous savons aussi que le départ de la descente du Dôme est difficile à trouver de nuit et, de surcroit, dans le brouillard. Je sais à coup sûr que nous sommes dans le bon secteur mais où est cette foutue trace ? En même temps nous voyons à peine dans le halo des lampes à 30m. Nous sommes sûrement juste à côté... Finalement nous retrouvons la trace avec le soulagement de la confirmation et en sachant que, maintenant, ça ira vite. Heureusement, car nous commençons à voir des éclairs de chaleur, mais, pour le moment, toujours pas de tonnerre.
La descente se passe bien même si les deux naufragés sont sur les rotules. Je suis un peu inquiet de quelques crevasses mal placées que j’ai vues dimanche dernier. Il ne manquerait plus que ça... Nous atteignons enfin l’arête de l’aiguille du Goûter et ses petites remontées. À grands coups de “come on Dan” “let’s go” et de “good job”, nous franchissons la dernière butte et devinons le halo du refuge. L’ambiance devient subitement plus électrique. Est-ce la présence de tout ce métal ou celle de l’orage qui arrive pour de bon ? Quoi qu’il en soit nous coupons la dernière pente et entrons au plus vite dans le refuge. C’est un soulagement énorme. Je dis à Thomas que je sors faire le compte rendu radio pour dire que nous sommes tous en sécurité dans le refuge. Je lui dis en rigolant : “je vais essayer de ne pas me faire foudroyer avec ma radio“. Alors que je sors, et passe mon message radio, un éclair illumine tout le décor ! Je rentre quasiment en sautant dans le refuge sous le regard stupéfait de Thomas. Nous nous déséquipons. Dan n’a plus la force d’enlever ni ses crampons ni ses chaussures. Nous arrivons enfin dans la salle commune, l’un des guides dit en me voyant “il n’a pas l’air si mal”, pensant que je suis une des victimes... Après avoir réalisé le bilan de Dan dans l’infirmerie du refuge il arrive dans la salle. Il ne sait pas quoi dire pour nous remercier. Après avoir mangé et bu, nous allons nous coucher dans le dortoir avec Dan et Matt afin de rester à proximité s’ils devaient aller mal dans la nuit. Dix secondes après s’être couchés, ils ronflent. Ils ronfleront toute la nuit ! Je me dis : “au moins, ils respirent.” Le matin, le temps est bouché, il tombe du grésil et il y a du vent. Des éclaircies sont annoncées. Que fait-on ? On attend là ou on attaque la descente ? Finalement, après discussion avec le bureau nous décidons de descendre car le nuage reste bien collé sur le refuge. Dragon se propose de nous récupérer dès que nous serons sous la couche nuageuse. Nous descendons. Deux secouristes sont encordés avec chaque victime car leurs pas sont encore hésitants. Dan nous fera même une petite baisse de tension, à la limite du malaise vagal. Peu de temps après, la météo permet à Dragon de l'extraire en treuillage avec Thomas.. Matt est aussi évacué en treuillage avec Johann. Ils vont vers la DZ. Les 4 autres secouristes descendons jusqu’à l’éperon avant la traversée du couloir où notre récupération par dragon sera facile. Initialement envisagée en appui patin, ça sera finalement en treuillage car nous risquerions d’envoyer des pierres sur des alpinistes qui montent sous l’éperon.
Nous sommes tous très heureux ! Une petite photo dans l’hélico et c’est le retour à la DZ. Dan et Matt sont transférés à l’hôpital en ambulance. Les examens sont bons même si les analyses de sang de Dan ressemblent à celles des coureurs de l’UTMB ! Matt devra soigner ses yeux avec des antiseptiques et des collyres. Nous sommes félicités par les premiers à marcher du jour et par Stéphane qui est à la DZ. C’est une chance d’avoir vécu un tel secours où tout s’est aligné favorablement. Nous avons eu de la chance et nous avons su en tirer profit. L’entraînement, l’expérience de la haute-montagne dans le mauvais temps, la cohésion d’équipe sur le terrain et avec le bureau auront été déterminants pour la réussite de cette opération. C’est la réussite d’une équipe mais aussi celle du PGHM dans sa capacité à #répondreprésent dans ce genre de situation".

Fred, PG de Chamonix, adjudant-chef, guide et chef de caravane de secours en montagne





Tout le monde savait que c'était impossible... est venu un idiot qui ne le savait pas, et qui l'a fait!
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Boviner, c'est contourner par le centre...

19 août 2020 à 08:00:23
Réponse #4

greenman


eh bien!! nous avons de la chance d'avoir des gens comme eux!
Voici une vidéo sur la réalisation de ma cabane - http://vimeo.com/23283003

19 août 2020 à 08:48:30
Réponse #5

raphael


On a du mal a se représenter la difficulté de ce genre de sauvetage, il suffit d’expérimenter une journée en moyenne/haute montagne avec des conditions pas top pour comprendre le gap que cela représente si on se trouve au mont blanc sous conditions météo dégradées
Se connaitre et s'accepter


20 août 2020 à 11:15:10
Réponse #6

VieuxMora



20 août 2020 à 12:54:21
Réponse #7

Buffalo


Une belle histoire qui finit bien ce qui ne doit pas être le cas à chaque fois, je plains les personnels du PGHM qui doivent prendre la décision de laisser une personne dans la montagne parce qu'ils savent que cette personne n'est pas en état de marcher pour rejoindre un lieu sécurisé, c'est une décision qu'ils doivent prendre et qui doit les hanter toute leur vie. Chapeau à ces hommes d'éxception.
Je cause pas aux cons, ça les instruit "Audiard"

20 août 2020 à 14:30:53
Réponse #8

azur


Cette décision, les hommes du PGHM y sont confrontés fréquemment mais ils sont loin d'être les seuls.
N'importe quel montagnard doit se poser cette question avant de s'engager dans une course exigeante.

L'histoire de Joe Simpson est là pour le rappeler: https://fr.wikipedia.org/wiki/Joe_Simpson_(alpiniste)

Je côtoie régulièrement un ancien du GMHM: pour intégrer ce groupe, il faut avoir accepté d'avance la possibilité de laisser un camarade en montagne si son sauvetage fait prendre trop de risque.
Tout le monde savait que c'était impossible... est venu un idiot qui ne le savait pas, et qui l'a fait!
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Boviner, c'est contourner par le centre...

20 août 2020 à 15:08:01
Réponse #9

Buffalo


J'ai bien compris Azur je me suis peut être mal exprimé cela doit marqué l'esprit à vie de laisser une personne dont on est sur qu'elle n'a aucune chance.
Je cause pas aux cons, ça les instruit "Audiard"

20 août 2020 à 15:31:47
Réponse #10

azur


Oui... c'est terrible de vivre avec ça.
L'exemple de Joe Simpson est intéressant: il n'en a jamais voulu à son camarade d'avoir coupé la corde.
Tout le monde savait que c'était impossible... est venu un idiot qui ne le savait pas, et qui l'a fait!
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Boviner, c'est contourner par le centre...

20 août 2020 à 16:01:28
Réponse #11

pommeau


Merci Azur pour cette histoire de Joe Simpson que je ne connaissais pas.  :doubleup:
Bien racontée par lui même sur ce lien https://www.redbull.com/fr-fr/theredbulletin/joe-simpson-la-mort-suspendue
"La vie ce n'est pas d'attendre que l'orage passe, c'est d'apprendre à danser sous la pluie"
Lucius Annaeus Seneca

19 avril 2023 à 08:36:38
Réponse #12

azur


Encore une histoire de secours en montagne... qui illustre (s'il était besoin) l'importance du mental:

https://www.youtube.com/watch?v=UO6w9Low1TY

Le lieu du sauvetage, avec le problème de porte qui s'ouvre vers l'extérieur (à l'inverse des refuges de montagne): https://www.refuges.info/point/3760/cabane-non-gardee/Cabane-Jean-Luc-Coutaz-Replan/
Tout le monde savait que c'était impossible... est venu un idiot qui ne le savait pas, et qui l'a fait!
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Boviner, c'est contourner par le centre...

19 avril 2023 à 20:01:50
Réponse #13

Loriot


Salut. Un podcast que j’ai particulièrement apprécié et qui décrit bien comment la mer.. s’installe.
Personnellement à la fin j’ai versé une larme.
Mais aussi quelques leçons qui sont souvent répétées et aussi souvent mises de côtés…
Écoutez avec un casque. (Audio hein!) je trouve que c’est plus prenant ainsi.

https://www.lesothers.com/podcast/gaelle-cavalie-survie-aiguille-verte

Édit: pour une fois, le côté de la « victime » est bien décrit.
Quand Pourine veut la lune tu lui baises les pieds

19 avril 2023 à 23:38:04
Réponse #14

VieuxMora


Merci Azur pour les liens
Témoignage très prenant.
Et cette dame a un ange gardien de top niveau !
Je me suis demandé ce que j'aurai fait dans ce contexte de "serious escape game".
Après avoir regardé les photos de la cabane, je me suis demandé s'il aurait été possible de tordre le haut de ma porte avec un piolet.
Lorsque je faisais du ski de rando, essentiellement en Vanoise et Vercors, j'avais toujours un petit piolet sur le sac. Pas très Mul, mais sécure.
D'autres idées ?

20 avril 2023 à 07:00:54
Réponse #15

azur


S'agissant d'une alpiniste aguerrie qui partait pour plusieurs jours de ski de rando, j'imagine qu'elle avait un piolet...
On trouve des piolets de moins de 300g qu'on peut prendre partout, et j'en emporte un même en été.

Je poserais plutôt la question d'une radio, surtout qu'il y a des relais du grand réseau des Alpes autour: http://www.radio-secours-montagne-isere.com/architecture-generale.html

Et avec 5W en VHF, elle aurait très certainement réussi à déclencher un relai, même sans pouvoir parler.

Il faut savoir que la programmation d'un poste pour ce réseau est payante, mais chaque poste dispose d'un identifiant qui est émis quand on essaye de déclencher un relai, donc même si la communication ne passe pas, les centres de secours savent:
- quel poste a déclenché le relai... ils peuvent donc contacter la famille
- quel relai a capté le signal, ce qui délimite une zone de recherche
Tout le monde savait que c'était impossible... est venu un idiot qui ne le savait pas, et qui l'a fait!
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Boviner, c'est contourner par le centre...

20 avril 2023 à 07:41:20
Réponse #16

raphael


Au chaud derrière mon clavier :

j'aurais essayé d'attaquer le toit (dos au sol et avec les jambes) et surtout vu la configuration des lieux , surtout ne pas fermer complétement la porte quitte a laisser rentrer de la neige.

En tout cas cela fait froid dans le dos et plus trop envie de partir seul en montagne en hiver.
Se connaitre et s'accepter


20 avril 2023 à 10:33:03
Réponse #17

Chill


Au chaud aussi, loin d'un relief enneigé.

[Mode naïf  :-[ ]
Pourquoi n'a-t-elle pas utilisé son DVA/ARVA ?
En rando isolée, je suppose qu'elle en possédait un en état de marche ?
[/Mode naïf  :closedeyes:]

     Chill.
"Un sauveteur isolé est en mauvaise compagnie."

20 avril 2023 à 11:35:15
Réponse #18

azur


[Mode naïf  :-[ ]
Pourquoi n'a-t-elle pas utilisé son DVA/ARVA ?
En rando isolée, je suppose qu'elle en possédait un en état de marche ?
[/Mode naïf  :closedeyes:]
La logique voudrait que oui... mais isolée pour 3 jours dans un massif où elle avait peu de chance de croiser du monde, le doute est permis, d'autant que l'intérêt d'un DVA, c'est de permettre la recherche et l'extraction rapide, pas la recherche d'un corps enseveli depuis plusieurs heures.

Par ailleurs, la portée d'émission du DVA reste vraiment limitée: 120m grand maximum, mais le plus souvent 10 à 30m
https://www.montagne-secu.com/fr/portee-maximale-portee-minimale-utile/
Tout le monde savait que c'était impossible... est venu un idiot qui ne le savait pas, et qui l'a fait!
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Boviner, c'est contourner par le centre...

20 avril 2023 à 18:45:05
Réponse #19

Merlin06


Être à plusieurs c'est pas seulement une question de muscles/matos, c'est aussi avoir plusieurs cerveaux dont un qui évitera peut-être la boulette. ;)
L'âme sûre ruse mal.
Le matin du grand soir il y aura de la confiture de bisounours au petit déjeuner.
Nous avons deux souverains, Dame Physique et Sire Temps.

20 avril 2023 à 18:58:45
Réponse #20

Khee Nok


Au chaud aussi, loin d'un relief enneigé.

[Mode naïf  :-[ ]
Pourquoi n'a-t-elle pas utilisé son DVA/ARVA ?
En rando isolée, je suppose qu'elle en possédait un en état de marche ?
[/Mode naïf  :closedeyes:]

     Chill.

Egalement au chaud devant son clavier:

Est-ce que quand on est seul et un peu loin de tout c'est pas une bonne idée de donner sa position à un proche, quand on se pose quelque part (apparemment dans cette zone il y a du réseau donc un SMS pouvait passer) ?

Plutôt que de dépendre d'un bout de couverture de survie, moderne bouteille à la mer.

 


Keep in mind

Bienveillance, n.f. : disposition affective d'une volonté qui vise le bien et le bonheur d'autrui. (Wikipedia).

« [...] ce qui devrait toujours nous éveiller quant à l'obligation de s'adresser à l'autre comme l'on voudrait que l'on s'adresse à nous :
avec bienveillance, curiosité et un appétit pour le dialogue et la réflexion que l'interlocuteur peut susciter. »


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