Bonjour
quel beau récit
et qui prend aux tripes
Il me donne envie de réagir sur plusieurs points, même si j'ai une petite vie tranquille.
D'abord je trouve que tu as un instinct incroyable. En cas de pagaille intérieure, ça marche pas toujours bien (la deuxième nuit plusieurs personnes relèvent que tu as fait l'erreur d'y retourner, et tu racontes à plusieurs reprises que tu étais en mauvais état d'esprit). Mais en même temps, ne pas s'alarmer à chaque danger passé, y retourner, je trouve que c’est la qualité qui fait que tu vis pas reclus chez toi pour toujours (comme je le fais). Alors je trouve ça bien moi.
Les chiens. En lisant ton récit je me suis dis : s'il avait eu un chien, ou quelqu’un, il se serrait fait prendre. Les chiens, c'est un peu comme les mecs bourrins, ça fait du bruit en croyant qu'il suffit d'exister pour chasser les fantômes. Et en plus, quand ça dort, ça dort. Je me fierais pas à un chien. Et il aurrait été tué en donnant l'alarme. Ton instinct, il a l'air plus fiable.
Le mauvais état mental. Je déteste que quelqu’un me parle comme ça, et j'y crois pas, et je refuse catégoriquement d'y croire, mais quand même, quand j'ai un gros soucis qui me ronge le mental, les chiens m'aboient dessus, les caissières sont moins sympa. La dernière fois que je me suis faite larguée, un parfait inconnu m'a jeté un sceau d'eau sur la tête, dans une rue que je prenais jamais. On dirait qu'un filet de poisse se tisse au dessus de moi et attrape les problèmes pour moi. Est ce que ces types très sombres ont été attirés par tes soucis ? Est ce que tes soucis t'ont fait te rendormir et rester sur place car ça faisait déjà des jours que tu luttais contre ton intérieur ?
Pousser le wagon. C'est comme ça que j’appelle le fait qu'on peut pas rester tranquille longtemps. Quand t'es malade, tu luttes, quand tu vas bien, ben tu vas chercher un truc à pousser, contre lequel focaliser toutes tes forces. C'est tout à fait impossible de pas faire ça. Quitte à prendre des risques. Sinon c'est pire que d'être mort, c'est être un zombi. Vu tout ce que tu racontes, tu vas super bien alors tu pousses ton wagon toujours plus loin. Je crois que c'est ça. Les gens qui vont super bien n’imaginent pas que les autres, ils poussent leur wagon, que c'est dur pour eux, alors que pour le type fort, ça ne serait pas un effort et il se demande pourquoi les autres acceptent de vivre sans effort. Mais si, en fait ils en font. Ils y a des wagons qui te rendent plus forts et d'autres non.
Et t'as de la chance d'avoir risqué ça dans un contexte où tu as été chercher toi-même une situation risquée. Même si c'est dans une zone que tu te racontais tranquille. Ça te laisse encore de la vraie tranquillité pour une très large plage. Une large plage où tu te crois en sécurité.
Enfin, j'espère, je te le souhaite.
Un jour en lisant un truc ici j'ai eu l'idée de chercher sur internet s'il y avait des infos concernant des coups de feux entendus un été où j'étais allé dormir dans une forêt d'IDF. Et oui, à cette date il y avait eu un couple tué par des braconniers. Cette nuit là j'avais haï la confiance du pote qui dormait à côté de moi, qui avait choisit un coin pas très discret, mais j'essayais de me dire que je risquais rien, que c'était moi qui imaginait que les mecs qui tiraient avec autant d'aplomb dans une zone interdite étaient forcément complètement barjo et sans limites au point de s'en prendre à un couple de marcheurs. J'avais une idée extrêmement précise de leur état d'esprit, je voyais en imagination leur pas, la façon exacte avec laquelle ils avançaient. peut-être qu'il y avait du vrai, que l'instinct choppe des trucs à distance. C'est troublant de confronter la réalité aux histoires qu'on se raconte. Moi j'ai lu ça sur une page de journal des années après. Ca facilite les choses pour confronter les deux états d'esprits, celui qui se raconte des histoires et celui qui reçoit la vérité. Toi, c'était en même temps.