Pour les enfants c'est encore un peu différent. Nous, adultes, avons la responsabilité de voir, et percevoir ce qui n'est pas dit. Et c'est clair que je m'inquiète moins quand ça fait du bruit !
Pour les adultes, c'est difficile d'entrer dans le monde de souffrance qu'ils cachent (pour toutes sortes de bonnes et de mauvaises raisons) sans se vivre comme un intrus potentiel ou même sans être perçu comme tel. On ne lâche pas si facilement cette sorte d'image idéalisée de soi-qui-va-bien, soi-fort, soit-tout-puissant. Quand on est pudique et qu'on a du mal avec l'étalage permanent de la souffrance ou simplement de l'étalage de soi (omniprésent je trouve avec internet, ou d'autres médias), on se trouve peu enclin à risquer de dépasser la limite du décent.
Je suis en phase de récidive, depuis Noël. L'expérience du "sans douleur" aura été courte mais m'aura au moins permis de finir (avec beaucoup d'aide - et ça d'ailleurs ça n'aurait pas été possible avant, avant la chute de mes illusions sur mon invincibilité
) les travaux de la maison que je m'étais assignés, et de pouvoir désormais y vivre. C'est pas cette année que je pourrai expérimenter le "je fais mon bois toute seule pour l'hiver", mais ces mois de tranquillité c'est déjà ça de pris. J'avoue j'ai continué à "cacher", sauf à certaines personnes qui me sont proches, pour toutes les raisons évoquées plus haut, parce que je ne voulais pas que ce truc remplisse ma vie au-delà du coin de mon corps où il est circonscrit, et puis parce que bon, chouiner n'a jamais fait partir la douleur chez personne.
Cette fois en revanche j'ai pas attendu des plombes avant d'agir pour éviter que ça prenne des proportions dangereuses et ingérables. J'ai rencontré un médecin cool (sa fille est atteinte, il comprend, ça aide) qui a revu mon traitement antalgique de fond en comble (et pas en augmentant les doses de paracétamol ^^), et une nouvelle intervention est planifiée rapidement (cet été). Cette fois j'ai bon espoir que ça ne revienne jamais, ils vont me virer la moitié du bide
Je dirais du coup qu'autant qu'être attentif à la souffrance cachée de l'autre (ce qui est certes essentiel quand cet autre n'est pas en capacité de trouver quoi en faire seul), il est nécessaire de donner des billes à chacun pour qu'il se prenne en charge systématiquement et au plus tôt (quand il en est capable), sache chercher l'info, creuser, taper aux portes, et à la bonne porte de préférence.
Et ça, ça commence par l'éducation, tout petit, et notamment par la formation de l'esprit de compréhension du monde, d'un Ego équilibré (confiance en soi et en ses intuitions, sans développer d'illusion de toute-puissance), et l'apprentissage du refus du fatalisme.
Bwef