Mouais, facile avec une peluche..
Petit exemple vécu dans l’année 197x..
A cette époque j'aidais des voisins à transporter à dos les trosses de foins en montagne, et déchargeais du camion les sacs de ciment de 50 kg par deux pour aller plus vite...
J'ai utilisé deux fois avec succès la technique de corde lovée en huit sur un bon trajet. L'aventure ici se passe en Oisans au retour du Glacier de la Temple, presque arrivée au refuge de Temple Ecrins. Une jeune femme de notre groupe se pète la cheville contre un bloc de rocher, par marche inattentionnée en fatigue de fin de course. Elle arrive cependant à redescendre, à moitié portée à califourchon, à moitié très douloureusement à cloche pied jusqu'au refuge. Après récup de nos affaires, collation, et un léger bandage, elle ne peut remettre le pied dans sa godasse. La cheville est enfle comme une baudruche. Nous avisons de sa redescente.
Prévenu par radio téléphone de l'époque, le muletier avance sa livraison de boissons au refuge inférieur et viendra à notre rencontre en bas de la grosse descente.
Retrouver la bonne longueur de brassée des huit de corde est assez difficile en situation. Il m’a fallu trois fois avant de trouver la bonne, aidé par pleins de conseils amis. Les tentatives de faire des huit directement a été abandonnée car la corde vrillait tant et plus. J'ai donc lâché des anneaux normaux, comme je sais bien les faire de manière réguliere, et à chaque tour à terre le coéquiper synchro le croise en huit au fur et à mesure de son dépôt. Très pratique et guère plus long pour éviter le tas de nouilles.
C'est moi 1,765 m 68 kg qui m'y colle pour la descente. La femme, mains autour de mon front, est un poids plume en comparaison de la charge de ma montée de l'avant veille (claie de deux bouteilles 13 kg de gaz ménage pour le refuge, plus mon sac plein de bouffe pour deux jours et quincaillerie d'escalade). Les derniers tours de la ficelle ne sont pas enroulés, mais réservés pour une assurance à double sous ses bras et mon torse, pour éviter une chute en cas de perte de conscience ou déséquilibre par déport vers l’arrière. On avance doucement sans broncher, et la pointe du piolet long de l'époque est un plus indéniable dans les retournements de lacets acrobatiques de ce raide sentier de 500 mètres de dénivelé.
Plus l’assise est haute, mieux c’est. De toute façon, elle sera transportée de manière bientôt inconfortable pour elle. L’assemblage se détend et la bonne répartition indolore des cordes au départ glisse sous ses cuisses. Soit elle est de plus en plus plaquée, cuisses sciées contre mes fesses, soit se reprenant pour retrouver le confort, elle se suspend près des genoux. Je la remonte alors par une reprise de mouvement comme un vulgaire sac à dos. Outre la douleur de sa jambe, que je cogne une fois grâce à Murphy, le moral est bon et le rythme de marche régulier. Deux minis pauses pour l’asseoir sur un bloc ou un accotement de sentier sans réelle mise à terre, et nous sommes vers le puissant ruisseau du Vénéon.
La prise en charge par la mule du refuge du Carrelet nous a fait gagner plus d'une demi-heure, pour le retour de la dame, coincée sur le dos de l'animal entre les caisses de bouteilles vides consignées, vers le médecin de La Bérarde. Péroné cassé et sa tête déplacée. Niveau confort, la personne nous a avoué avoir bien plus souffert le dos de l'animal que sur le mien.
Le port avec corde pliée en huit permet aussi la descente en rappel sans descendeur, que j'ai testé sans problème en exercice réel. J'ai aussi utilisé par la suite en opération de secours, plusieurs sortes de claies mini chaise-cacolets dont l'avantage est que c'est plein de poignées et armatures permettant aux coéquipiers d'aider dans les passages difficiles, voire d'être utilisé comme diable traîneau ou chaise à porteurs. Le matériel a bien évolué sans cesse ensuite, jusqu’aux nacelles et coques moulées actuelles.
Ce mode de transport est évidemment non préconisé aux blessés de grosse chute, mais à des personnes valides. Pensez toujours à l'hémorragie interne ou à la brisure vertébrale invisible, où dans ce cas tous les moyens de rapidité et de professionalisme doivent alors sans aucune hésitation être saisis.
PS - Une autre technique d’urgence vite mise en oeuvre est d’utiliser le paquet de corde pliage normal, spires de finition bien arrêtées par de bons noeuds. Les jambes du blessé conscient sont passées entre la moitié des anneaux départagés. Les deux autres moitiés également départagées, passées sur vos épaules, servent de bretelles de traction que vous pouvez faire coulisser pour un portage aisé court et rapide à la pompier, le corps en avant. Ceci permet de dégager très rapidement un blessé des jambes d’un endroit qui craint.
mazel