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Suite à ton post, j'en suis venu à me poser la question, doit on pour éviter ce genre d'experience ne pas aller à la rencontre de personnes qui ont l'air d'avoir besoin d'aide dans la rue en ville ?
Je découvre un peu tard ce fil lancé par le post de Jed, et je suis au passage surpris que personne n'ait explicitement soulevé ce point plus tôt (même si la priorité était très clairement de répondre à Jed sur un autre plan)...
J'ai l'impression que cet aspect soulevé par jvanier n'est pas pour rien dans le traumatisme subi par Jed. C'est une chose, déjà en elle-même traumatisante, d'être agressé. C'en est une autre, probablement plus difficile à digérer, d'être agressé en étant piégé par quelqu'un qui manipule nos bons sentiments...
Je suppose qu'en pareil cas on ressent, en plus du choc de l'agression lui-même, de la blessure à l'égo, du sentiment de culpabilité d'avoir joué un rôle dans ses propres déboires (ce qui fait déjà pas mal!), un fort sentiment de trahison... Je suppose aussi que, au-delà de la sidération immédiate bien évoquée par Patrick un peu plus haut, ça remet plus fondamentalement en cause qu'il n'y paraît à première vue, et durablement, la question du rapport aux autres...
En tout cas, la question posée par jvanier est une vraie question... Sans aller forcément jusqu'au piège particulièrement abject (mais efficace) tendu à jed, il y a dans la vie quotidienne toute un échelle de situations qui permettent à un "prédateur" de nous surprendre facilement (situations que, délibérément, je préfère ne pas évoquer en public) en faisant appel à nos bonnes dispositions envers notre prochain, voire à notre simple courtoisie...
Alors que faire : tomber dans la paranoïa ? Ne plus s'approcher de personne ?
Il est vite évident qu'une telle attitude ne va guère nous épanouir... Si l'on reprend la morale simple mais sûre proposée par David pour éclairer les choix à faire sur ce forum (en substance, est-ce que notre attitude va dans le sens de plus de vie, ou l'inverse ?), ça n'apparaît pas comme une bonne solution.
Par ailleurs, mon avis personnel est qu'il vaut mieux se tromper en faisant confiance que se tromper en refusant de faire confiance...
La confiance, selon une maxime bien connue, n'exclut cependant pas le contrôle (ou, ici, la vigilance)...
Quelques suggestions donc d'éléments de repère, lorsqu'on est en situation de pouvoir aider dans la rue quelqu'un qui en a apparemment besoin, pour ne pas refuser cette aide à tort et à travers :
- d'abord évidemment tenir compte du contexte pour évaluer a priori le niveau de risques : pour caricaturer, si on est un terroriste palestinien sur la liste noire du Mossad, même dans un quartier sûr et en plein jour, il faudra se méfier même d'un enfant dans une poussette ; si on est un citoyen lambda dans la même situation, il ne devrait pas y avoir trop de risques à aider la mère de famille à descendre avec sa poussette les marches du métro...; à l'inverse, et comme l'illustre l'histoire de Jed, si on est la nuit à la fermeture des restos dans un quartier réputé pour sa vie nocturne, on est a priori sur un territoire de chasse pour les prédateurs, donc méfiance...
- se fier comme toujours (et surtout pas moins) à son intuition : en d'autres termes, ne pas faire passer les considérations de respect humain avant l'intuition (je renvoie ici à l'exemple cité par Serge quelque part sur le forum, de la femme qui monte seule dans un ascenseur bien que s'y trouve déjà un type qu'elle ne "sent" pas et qui quelques instants plus tard la violera);
- rester (ou passer) au moins en vigilance "orange" et à cet égard se méfier de l'empathie naturelle que l'on peut éprouver (ce qui sera beaucoup plus difficile pour certains que pour d'autres, question de caractère) : l'heure du "dépannage", de l'aide "de rue", voire du sauvetage, n'est pas celle de l'écoute ou de l'accompagnement; il faut donc rester le plus possible sur un mode rationnel et non émotionnel et ceci est même légitime au regard du but poursuivi;
-et, sans doute le plus compliqué à cet égard, veiller en particulier à ne pas trop se laisser embarquer par des questions "brain engaging" (si l'on est plusieurs et que le moindre doute subsiste, sans doute faut-il se répartir les rôles: un qui réfléchit au problème posé, l'autre qui "veille" avec plus de recul)...
Bon, il n'y a là rien de génial ni d'innovant, et certains auront certainement mieux à partager, mon propos étant juste de souligner qu'on doit pouvoir continuer à prendre le risque d'aider dans la rue ceux qui semblent en avoir besoin ou vous demandent de les dépanner, au prix d'un minimum de vigilance...
Il ne s'agit toutefois évidemment pas de prétendre donner des leçons à qui que ce soit, et surtout pas à Jed, qui s'est quand même manifestement fait embarquer dans un piège précisément extrêmement difficile à déjouer...
Cordialement,
Bomby
PS : on s'éloigne ici du sujet initial lancé par Jed, pardon pour le HS, et peut-être sera-t-il opportun de déplacer ce post...