L'efficacité de l'aspi-venin n'a pas pu être démontrée cliniquement. Il peut par contre avoir un effet bénéfique qu'il permet de calmer la victime et de la faire s'asseoir et arrêter de bouger.
Voici un texte que j'avais pondu il y a quelques temps :
La vipère est un animal à sang froid (poïkilotherme). Dénué de mécanismes de régulation de température corporelle, la chaleur de son corps varie en fonction de la température ambiante. Son métabolisme s'accélère lorsqu'il fait chaud, et ralentit considérablement lorsqu'il fait froid. Sous 10°C, les vipères sont en complète léthargie. Elles ne représentent donc aucun danger l'hiver, et pendant toute la saison froide.
Les vipères sont plus lentes au petit matin, ou par temps plus frais, et ne pourront pas s'enfuir aussi vite qu'elles le voudraient, et peuvent se sentir menacées un peu plus facilement par votre présence, mais elles tenteront généralement la fuite avant toute autre option.
Les vipères affectionnent particulièrement les broussailles et les endroits relativement confinés, où elles se faufilent aisément et où elles trouvent de petites proies en quantité. Pendant les périodes extrêmement chaudes, on voit souvent les vipères se mettre à l'abri dans les endroits plus frais et plus humides (sous les gros cailloux au bord des ruisseaux, par exemple). Elles passent ainsi dans l'eau de temps en temps pour se rafraîchir, et restent à l'ombre pour éviter de surchauffer. Pendant ces périodes, elles sont en pleine possession de leurs moyens, et elles s'enfuient généralement si elles détectent votre présence suffisamment tôt pour s'éloigner sans être vues. Si, par contre, une vipère ne s'aperçoit de votre arrivée que trop tard, elle préférera généralement adopter une position défensive, plus ou moins lovée et vous faisant face. Cela s'explique facilement de par le fait que le principal point faible des vipères est leur dos. Elles préfèrent donc faire face et attendre plutôt que d'exposer leur dos à un prédateur potentiel. Ce genre d'attitude des vipères est bien résumée par le dicton qui veut que « la vipère donne la mort ou attend la mort »... En fait, les rares vipères que l'on voit sont celles que l'on a surprises, et qui n'ont pas eu le temps de mettre leur dos à l'abri avant qu'il ne soit trop tard.
Une vipère qui adopte ainsi une position défensive pourra mordre si on s'approche trop. Mais si on s'éloigne simplement de quelques mètres, lui laissant une marge suffisante pour filer sans exposer son dos trop longtemps, elle profitera pratiquement toujours de l'occasion et s'enfuira.
Comme la plupart des serpents, la vipère est pratiquement sourde. Elle est cependant très sensible aux vibrations du sol. Aussi, pour se faire remarquer d'une vipère il suffit de taper du pied. Elle s'éloigne alors pratiquement toujours. En marchant un peu lourdement, ou en tapant un peu le sol avec un bâton de marche à chaque pas, on n'en voit, en pratique, jamais.
La vipère est un animal extrêmement craintif. Elle n'attaque jamais un être humain sauf en cas d'extrême nécessité, lorsqu'on l'attrape, par exemple, ou lorsqu'on lui marche pratiquement (ou directement) dessus. Il arrive qu'une vipère acculée attaque pour se défendre, ou qu'une femelle protège son nid. En s'éloignant simplement on rassure la vipère et on se met à l'abri.
Contrairement à la croyance populaire, la morsure d'une vipère n'est pas d'une rapidité extrême. Elle est rapide, certes, mais beaucoup moins rapide qu'une patte de chat, par exemple. Aussi, il est parfois possible d'éviter la tentative de morsure (qui est extrêmement rare en soi), simplement en retirant son pied ou sa main à temps...
Même si la vipère nous mord (ce qui est rare, vous l'avez compris...), la situation est loin d'être désespérée. En effet, neuf fois sur dix la morsure d'autodéfense est « sèche » : aucun venin n'est injecté (Dr. Éric Torres, Urgence Pratique No. 2123, Juin 2001). Autrement dit, la vipère n'injecte du venin pour se défendre qu'une fois sur dix. Et de cette fois sur dix, seule un cas sur dix constitue une envenimation grave... Autrement dit, seule une morsure de vipère sur cent cause des effets réellement graves (et pratiquement jamais mortels, surtout si la victime a accès à des soins médicaux)... Le plus grand risque provenant des morsures de vipères reste donc, et de loin, la panique et l'infection ! La première chose à faire, en cas de morsure, est donc de bien nettoyer la plaie, et de la désinfecter... tout en restant calme.
Dans les cas (rares) d'envenimation, un oedème apparait entre 15 minutes et deux heures après la morsure, près de la plaie. Si aucun odème n'est apparut après deux heures, on peut écarter toute possibilité d'envenimation.
La douleur est souvent faible ou inexistante au moment de la morsure. En cas d'envenimation, elle apparaît en même temps que l'oedème. Elle est, comme l'oedème, un symptôme sûr d'une envenimation, et va en augmentant pendant les 48 heures qui suivent la morsure. Un traitement antalgique est souvent prescrit, tout en évitant scrupuleusement l'aspirine, qui renforce l'effet anticoagulant du venin.
En cas d'envenimation, et selon le niveau de gravité, une hospitalisation peut s'avérer nécessaire. Dans les cas d'envenimation plus graves, il faut s'attendre à passer 48 heures plutôt désagréables (vomissements, douleurs, hypotension, diarrhées...). L'oedème de la partie atteinte ne disparaîtra souvent pas avant plusieurs semaines.
Les envenimations causées par les vipères sont évidemment plus dangereuses pour les personnes déjà affaiblies, et sur les personnes de petite taille. Comme pour toute substance, le rapport entre le poids de la personne et la quantité de venin injecté influence grandement les symptômes prévisibles, à dose égale. Chez les enfants, donc, on court le risque de voir se développer des réactions plus grave à une envenimation, même minime. On traite donc les morsures de vipère chez les enfants avec encore plus de sérieux que chez les adultes.
Certaines personnes sont allergiques au venin de vipère (très rarement lors d'une première morsure). Pour ces personnes, le risque est évidemment plus grand, car les symptômes allergiques s'ajoutent aux effets du venin. Une morsure « sèche » ne constitue pas de risque allergique.
Que faire en cas de morsure ?
La conduite à tenir, en cas de morsure de vipère, est tout d'abord de s'éloigner et de se mettre à l'abri. Le plus souvent, voyant que tout danger est écarté, la vipère (ou la couleuvre) s'enfuira d'elle-même et glissera hors de vue dans les broussailles. De s'éloigner de quelques mètres suffit généralement. Une fois tout danger écarté, il faut absolument rester calme. L'idéal est de s'asseoir et d'observer calmement la plaie. Les morsures de vipère se présentent presque toujours sous la forme de deux petits points ou éraflures, distants de cinq à dix millimètres. La présence d'autres petits points (marques de dents derrière les crochets) que ces deux principaux nous indique à coup sûr que le serpent qui nous a mordu n'était pas venimeux. Dans le doute, il vaut toujours mieux traiter la morsure comme s'il s'agissait d'une morsure de vipère.
Si on dispose d'une pompe à venin, on peut l'appliquer. Son efficacité n'a pas été démontrée cliniquement, mais certains manufacturiers affirment qu'appliquées moins de trois minutes après la morsure, elles peuvent éliminer jusqu'à 50% du venin. Qu'elle soit réellement efficace ou pas quant à l'extraction du venin, elle a un effet calmant sur la victime, et en cela elle est réellement efficace. En effet, en se calmant on ralentit la propagation du venin (si toutefois il est présent) dans l'organisme.
La deuxième étape consiste à bien désinfecter la plaie. On oublie souvent cette étape, mais les infections liées aux morsures de vipères sont un risque bien réel, dans certains cas plus importants que l'envenimation. Il faut ensuite, idéalement, immobiliser le membre atteint comme s'il s'agissait d'une fracture : en bloquant les articulations au-dessus et au-dessous de la partie atteinte. Ainsi, par exemple, pour une morsure au mollet, on bloquera (sans entraver la circulation sanguine) la cheville et le genou. L'immobilisation totale du membre est la mesure la plus efficace pour limiter la diffusion du venin dans l'organisme... si toutefois il est présent. Évidemment, on peut immobiliser le membre atteint consciemment en ne bougeant tout simplement pas...
La troisième étape, si c'est possible, consiste à appeler les secours ou à marcher (si on ne peut pas faire autrement) calmement pour se diriger vers une assistance médicale. Inutile de paniquer ou même de forcer l'allure. Il vaut mieux, au contraire, prendre son temps et rejoindre l'aide la plus proche. Selon la gravité de l'envenimation (classifiée de 0 : morsure sèche à 3 : envenimation grave par Audebert F., Sorkine M. et Bon C.) on vous renverra chez vous avez un joli petit pansement, des antalgiques et un rappel antitétanique, ou on vous gardera aux soins intensifs pendant quelques temps (de quelques heures à quelques jours), afin de pouvoir veiller sur vous de près.
À ne pas faire...
Il ne faut surtout pas faire d'incisions sur les lieux de la morsure, ni sucer la plaie avec la bouche (comme on le voit dans les mauvais films de cow-boys). D'inciser les vaisseaux superficiels ne fait qu'accélérer la diffusion du venin dans le sang, et sucer le venin avec la bouche peut être très dangereux... On imagine sans mal ce qui peut se passer si les tissus de le bouche ou de la gorge doublent ou triplent de volume, ayant été mis en contact avec du venin, même dilué. D'ailleurs, outre le venin, beaucoup de maladies (hépatites, SIDA, etc.) peuvent être transmises par le sang ou la lymphe de la victime, qui viendrait en contact avec une plaie, même très petite, dans la bouche de son sauveteur. Donc, en plus d'être inefficaces, ces succions dignes des plus mauvais westerns sont dangereuses. Évitez-les.
Évitez aussi les garrots. On a vu des gens devoir être amputés d'une jambe à cause d'un garrot privant le membre de sang, alors qu'aucune envenimation sérieuse n'était présente. Les garrots sont à proscrire, donc, même en cas d'envenimation évidente. On peut appliquer un bandage élastique faiblement serré en amont de la morsure, tout en prenant soin de ne pas freiner la circulation sanguine. Ce bandage, large et pas trop serré, a pour but de freiner un peu la circulation lymphatique et de limiter l'oedème dans le membre atteint, ralentissant un peu la diffusion du venin.
L'administration des sérums anti-venins (sérothérapie) est de plus en plus controversée. Ces sérums, en effet, causent souvent des réactions allergiques graves (notamment des bronchospasmes et des chocs anaphylactiques). On hésite, même dans les hopitaux équipés de salles de réanimation modernes, à les administrer. Aussi, sauf dans certains cas extrêmes, il est très risqué de les administrer loin de toute aide médicale appropriée. Les effets des sérums sont souvent plus graves que l'envenimation elle-même...
Ciao
David