Salut à toutes et à tous,
et merci à Discus d'avoir fait remonter ce topic. Y'a vraiment plein de choses intéressantes à développer ici.
En premier lieu, et même si ça paraît une lapalissade, oui, ça peut arriver à tout le monde de "tomber" socialement. Et très rapidement!
Ça fait 12 ans maintenant que je travaille dans le social, avec une spécialisation/porte d'entrée RSA (RMI à l'époque)... Je pourrais, si j'en avais la possibilité, vous parler d'un bon millier de cas de gens en pleine dégringolade, voire déjà au fond du trou. Il faut bien partir du principe et surtout intégrer qu'aucune vie n'est stable, que tout peut être le catalyseur du début des emmerdes: une (mauvaise) rencontre, la perte d'un proche, la maladie, un job qui se passe mal, une addiction, etc. Tout! Et quitte à me répéter, la spirale descendante est très très rapide.
Comme ça a été dit par Vagabond, je crois, un premier conseil dans l'urgence ou quand on sent que ça part en vrille: pousser la porte d'un service social. On est en France, pas en Centraf', et on a cette chance. Même si les services publics sont relous, même s'ils demandent 100.000 papiers, qu'on a l'impression parfois d'être une put**n de balle de ping-pong, ne pas lâcher l'affaire, il y aura toujours moyen d'avoir plus d'aide quand on est accompagné par des pros que si on essaie de se démerder tout seul, surtout si on a des mômes.
Le deuxième truc sur lequel je voulais insister, mais là ça se passe en amont: faire du réseau et l'entretenir, ne pas perdre de vue ses potes; si y'a moyen, la famille même éloignée, ça peut être d'un grand secours. La communauté c'est le bien! Tous les gens qui s'en sortent à peu près en cas de galère sont ceux qui ont du soutien, qu'il soit familial, communautaire ou autre, même quand ils sont dans une m*rde noire. Les plus désespérés sont ceux qui sont seuls.
Un autre truc que j'ai remarqué au long de ces années (je travaille sur l'agglomération de Lyon): la première demande de la plupart des gens en galère, c'est pas un boulot, c'est un put**n de toit. Sans adresse, pas de suivi de courrier, donc des galères administratives; sans toit, pas d'hygiène, pas de sécurité, et surtout pas de repos (pour ceux qui dorment dans leur voiture ou dans des caves). On ne pas vivre sur le qui-vive à long terme. Il faut commencer par ça, je pense... et là - ce n'est que mon avis - ben faut pas rester dans les mégalopoles ou les très grosses villes, où tout est fait pour les gens qui gagnent (très) bien leur vie, et où le prix des loyers et de la vie est exorbitant, du fait de l'offre et de la demande: tout le monde est attiré par les offres de boulot, y'a plus de demandeurs d'apparts que d'offre de logement, les prix grimpent et c'est parti la spirale infernale. Ah, certes, on a un job, mais on est obligé de dormir dans sa voiture ou dans le salon du pote qui veut bien nous héberger, quoi?, trois mois?... Super!
Les petites villes sont à mon avis un bon compromis en cas de "sortie de route": on a plus facilement accès à un toit, certes on est au minimum social ou on fait un boulot de m*rde parce qu'il n'y a pas trop d'offre, mais au moins on assure le minimum: la sécurité au dessus de la tête. Et c'est peut-être plus facile de se faire du réseau dans une petite ville que dans une énorme fourmilière impersonnelle. Les parisiens ou les lyonnais ne me contrediront pas, je pense...
A titre perso, j'ai failli dégringoler sévère deux fois dans ma vie (rupture familiale et séparation). Sans le réseau de la famille élargie, des potes et des connaissances, je serais tombé bas. Très bas. A l'époque, en ce qui concerne la rupture familiale, je ne connaissais pas les aides, le système et je ne voulais pas en entendre parler, je pensais m'en sortir seul. J'ai eu beaucoup de chances d'y être arrivé, et si c'était à refaire, je mettrai ma fierté dans mon mouchoir au fond de ma poche, pour sûr! En ce qui concerne ma séparation, c'est "ma" communauté qui a permis la résilience et de rebondir! Merci à eux.
Klaus