Salut a tous / toutes

Je n'ai pas eu l'opportunite de passer par Montlouis, Bayonne, Dieuze, Cercottes, Credenhill ou l'ile d' Islay

. Neanmoins le bon pere de famille que je suis estime que l' E&E est un sujet qui merite pleinement que l'on s'y interesse, et pas seulement si l'on sert sous les drapeaux.
Pour rappel, depuis le debut du XXeme siecle, la majorite des victimes des conflits armes sont civiles (la guerre des Malouines etant peut etre la seule exception), et les non combattants sont parfois deliberement vises, voire pire l'enjeux des conflits.
Echapper a une raffle, disparaître dans la verte et passer une frontiere ou une ligne de front a sauve plusieurs centaines de milliers de civils depuis 1933, et si il est certes preferable d'etre en bonne sante, d'un temperament sportif et dote d'un minimum d'equipement pour ce type d'exercice, de tres nombreuses personnes s'en sont sorti avec les moyens du bord.
Serge, un ami infirmier travaillant aupres des Karens dans les annees 90 a du fuir 6 jours dans la jungle Birmane afin d'echapper a la police secrete (l' infame SLORC) qui etait a ses trousses. Noceur de premiere, fumeur invetere et dote d'un physique d'amphore grecque, il a neanmoins reussit a rejoindre la fontiere Thailandaise en tongs et en pleine crise de malaria...

A Gorazde durant l'hiver 93; des centaines de femmes, d' adolescentes et de vieillards de l'enclave bosniaque ont parcourru plusieurs fois 40 kilometres de nuit et dans la neige a travers les lignes serbes pour ramener sur leur dos des sacs de farine. Trois de mes employees l'ont fait alors qu'elles avaient 15 ans, avec un sac de 20 kgs de farine sur le dos. Les hommes valides pendant ce temps etaient sur la ligne de front.
Ce ne sont que deux exemples parmis des millions d'autres.
S'agissant de matos, et au risque de paraître iconoclaste (ce que j'assume volontiers) voire irrespectueux (ce que je ne suis pas), je pense que John Wiseman, Barry Davies et consorts se plantent totalement dans leur recommandations au niveau materiel.
La plupart des belts kits et autres E&E pouches (materiel de survie et d'evasion accroches en permanence au brelage) que ces auteurs presentent dans leurs ouvrages ainsi que ceux que j'ai eu la chance de voir ne comportent souvent que des gadgets (la fameuse boite a tabac a tout faire et ses avatars a la Doug Ritter), des elements de confort accessoires (gamelle, combustible, rechaud a alcool, nourriture), ou des lames de 7 pouces minimum ne presentant aucun interet en situation d'exfiltration chaude.
Alors que pour le meme poids et encombrement et pour un tiers du prix on peut avoir des objets pouvant vraiment faire la difference dans un milieu tempere ou continental meme en hiver a savoir:
- un poncho
un bonnet
un « blizzard pack »
une vache a eau de 4 litres et de l'oxygene Anaerobique
une carte et une boussole
Relisez l'odyssee de Chris Ryan dans « The One That Got Away » ou comment un militaire professionnel et guide de haute montagne se retrouve en exfiltration avec pour seul vetement une veste en coton, sans poncho ni bonnet ni sac de survie mais trimbalant son E&E belt et un brelage de 20 kilos... Qu'il s'en soit sorti vivant est un miracle et surtout le resultat d'un mental et d'un physique hors du commun. Par contre, zero pour la preparation.
Pour un civil, l'evasion ne commence pas forcement a chaud (i.e.:patrouille de reconnaissance profonde compromise, avion abattu au dessus d'un pays ennemi)et peut donc (doit donc)se preparer.
Les elements suivants me semble importants:
1. Recueil d'information (etat des forces en presence, itineraire, relais etc...)
2. Mettre rapidement le plus de distance possible entre soi et « les predateurs »
3. Rester loin de toute presence humaine le plus possible
4. Ne pas faire de feu, laisser le moins de traces possibles de son passage (on oublie les cabanes et l'utilisation des instruments coupants, on ne dort pas dans une grange abandonnee, on ne « visite » pas les jardins si on peut s'en passer)
5. Limiter le plus possible le passage oblige a un point d'eau (les amis chasseurs du forum peuvent elaborer sur ce theme) d'ou la necessite de pouvoir stocker la precieuse boisson
6. On avance a son rythme et on passe les points chauds de preference de nuit apres une periode d'observation
7. On broute (pissenlits, orties et lombrics sont au menu de l'evade)
S'agissant du camouflage, la seule camera thermique que j'ai vu en 12 ans sur le terrain etait sur un VAB canon a cote de l'Holiday inn de Sarajevo. La possibilite d'avoir a prendre en compte ce type de materiel dans un scenario de E&E me semble infime ( a moins d'etre un evade V.I.P.) , sauf aux abords d'objectifs strategiques (i.e. Aerodrome militaire...) qu'il serait de toute maniere de bon ton d'esquiver ou a l'approche d'une frontiere ou d'une ligne de front.
Pour avoir passe (legalement) de nombreuses frontieres, il existe toujours des trous, generalement exploites par des generations de contrebandiers. A vous de trouver le bon passage si possible de nuit et apres une periode d'observation.
Pour terminer, plus que la derniere « ghillie suit », un deguisement astucieux peut egalement vous permettre de passer un check point hatif. Sur le meme registre que Fernandel dans « La vache et le prisonnier » j'ai connu a Sarajevo une femme musulmane qui a passe les lignes serbes deguisee en Babouchka, vetue de noir de pied en cape comme les femmes orthodoxes pratiquantes.
A+ Pierre
