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Auteur Sujet: Pédagogie et survie : l'approche manisienne à discuter...  (Lu 32089 fois)

01 octobre 2013 à 14:26:50
Réponse #50

Lockloc


Bien le bonjour,
j'ai eu l'occasion de tâter de l'enseignement/formation des 2 côtés de la barrière et selon différentes sources, différents cadres, que ce soit éducation nationale (élève), éducation nationale (intervenant), armée, formation au sein d'une entreprise, par le biais d'une entreprise, démarche volontaire ou non, etc.

Dans les propos initiaux, si j'ai bien tout compris, il n'est question que de l'enseignant et sa méthode. Si je suis globalement d'accord avec ce qui est débattu (parce que globalement, vous avancez tous dans le même sens), il est une règle que globalement je n'ai jamais vu remettre en question depuis que je l'ai apprise c'est que dans toute forme de communication, dans tout message (pratique/théorique/oral/écrit, etc) entre l'émetteur et le récepteur c'est à l'émetteur d'adapter son discours et de s'assurer que celui ci est bien perçu, selon la règle la plus simple qui soit : il n'y a que lui qui sait ce qu'il veut dire/faire passer...

Toutefois, et c'est quelque chose qui me titillait depuis le début de ce fil, Moss m'a fait remettre le doigt dessus, c'est, selon moi, à nuancer par un certain nombre de choses dont l'état d'esprit et la motivation du récepteur.
Même si ces 2 choses peuvent être en partie gommées par l'énergie, le charisme, la force, ce qu'on veut, en tout cas, par toutes ces petites choses qui vont entrainer une relation tendant vers la confiance entre l'élève/stagiaire/récepteur et le formateur/prof/sensei/émetteur.

Dans tous les cas, selon moi, seule une relation de confiance, établie d'abord unilatéralement puis éventuellement partagée, fera avancer la transmission du savoir, puis le savoir "tout court", car, sans cette relation, dur pour le récepteur de rester dans son rôle réceptif et attentif.

Pour les éléments de sélection, je pense que cela ne devrait entrer en ligne de compte, si et seulement si, il y a un nombre de place limité. J'ai vu des éléments qui étaient donnés perdus pour la France (ou tout autre patrie, ou l'entreprise, ou l'unité, au choix  ;#) se révéler de façon pleine et entière durant leur formation alors qu'ils se seraient frotté au mur s'il y avait eu sélection. Seulement, la formation leur a fait prendre conscience que finalement, ils savaient faire des choses...

J'ai d'autres idées qui se sont décollées lorsque vous avez secoué la pulpe avec cette discussion. Je vais essayer d'ordonner ça et je reviens.

A+
"La chute n'est pas un échec, l'échec c'est de rester où l'on est tombé" - Socrate -

01 octobre 2013 à 14:33:51
Réponse #51

bison solitaire



ce que tu décris, c'est surtout une utilisation dévoyée des évaluations. on n'évalue pas une personne, mais des compétences (savoir, savoir faire, savoir être). ça pose le problème de la formation des formateurs. Qui évalue l'évaluateur ? #)

ça, c'est aussi un gros souci dans le supérieur en france. les élèves me semblent très peu sollicités pour évaluer leurs profs et leurs enseignements. pourtant aucun système ne peut fonctionner sans boucle de retour !

Dans mon petit milieu, les évaluateurs suivent un stage de trois jours, pendant que les formateurs suivent un stage de 8 semaines. Autrement dit, les évaluateurs sont censés avoir intégré l'ensemble de que les formateurs vivent (je dis bien vivent: fond, forme, préparation, adaptation...) en trois jours. Et bien entendu il s'agit souvent de personnes qui ne savent pas, pour ne l'avoir pas vécu, ce qu'est un face à face pédagogique.
Toujours dans mon petit milieu, les stagiaires remplissent un petit formulaire d'évaluation (animation, documentation, salle, matériel...) et en tant que formateurs nous sommes évalués tous les deux ou trois ans...
Au final, tout à fait d'accord, on n'évalue pas une personne mais des compétences, et oui, il est nécessaire d'avoir un retour, mais beaucoup ont peur de ce retour car ils craignent ce qu'ils font: le jugement.

01 octobre 2013 à 14:43:33
Réponse #52

moss


En même temps, rien n'est plus odieux qu'un concours avec jury...

Ou comment favoriser/pénaliser sur des critères subjectifs (politiques & co), inconsciemment ou consciemment.

ça aussi c'est une généralisation gratuite... on peut aussi trouver plus juste d'être évalué par un groupe de personnes plutôt qu'une seule.

la plupart des évaluations sont subjectives (en dehors des qcm bien sûr). mais faire passer un entretien permet d'évaluer certains aspects du candidat, pas seulement ses connaissances. on peut évaluer ses capacités de réaction,  son sens critique, parfois sa capacité à s'intégrer dans une équipe. mais là, l'évaluation devient un vrai métier.
« Nous sommes dans la m*rde, mais ce n'est pas une raison pour la remuer.  »
Marcel Bigeard

« La fin de l’espoir est le commencement de la mort.  »
Charles de Gaulle

01 octobre 2013 à 16:01:54
Réponse #53

Lockloc


Dire à quelqu'un, sans autre fioriture, "tu es mauvais"...  ben c'est juste le démolir, saper son envie d'apprendre, et le pousser à rejeter en bloc l'institution qui le maltraite psychiquement en lui mettant le nez dans sa m*rde sans l'aider comme il le mérite...  et comme l'institution est sensée le faire (c'est son rôle, hein, faudrait peut être pas l'oublier).


De mon point de vue, dans ce qui est dit là on rejoint directement les points (ça va, t'es cohérent avec toi même  ;#) :
1.Toujours formuler ses critiques par la positive
2. Laisser un élève en situation d’échec est une faute professionnelle
5. On a besoin de plaisir pour apprendre
9. S’ils échouent, c’est de votre faute. S’ils réussissent, c’est grâce à leurs efforts
10. Aimez les avant tout
11. Coupez le cordon

Et (consciemment ou non ?) tu rejoins ici une partie des travaux de Herzberg ("Work and Nature of Man") :
grosso modo, l'homme au travail cherche au maximum à éviter la souffrance (surmenage, fatigue, stress) tout en cherchant à s'épanouir.
Clairement, ces 6 point y mènent.

Par contre, le point "4. Les marches doivent être juste assez hautes." me laisse songeur. Jusqu'à il y a peu (quelques années, avant que je ne me mettes à la course de fond) j'avais tendance à partager ce point de vue. Effectivement, une marche après l'autre, c'est plus facile à franchir qu'un mur, en général, ça fait nettement moins mal à l'atterrissage.
Toutefois, de façon tout à fait personnelle (j'ai moi aussi pas mal tendance à m'observer et à théoriser dessus), je m'étais rendu compte que je pouvais être plus satisfait d'un échec parce que la barre était trop haute que d'une réussite (pas la réussite facile qui ne compte pas mais celle "bien dosée"). Si je me rate parce que l'objectif est trop haut, cela me fera plus cogiter : qu'est ce qui me manque pour y arriver ? (Et globalement, mes résultats seront meilleurs que si je me contente de théoriser mes résultats d'entrainement).
C'est cette cogitation qui va entrainer ma satisfaction et cette satisfaction sera plus grande que l'élément déception d'avoir raté quelque chose.
C'est la course qui m'a fait prendre conscience de ça. Et je me suis rendu compte que c'est applicable dans mon quotidien. Maintenant, il est possible que cet "état" soit une conséquence et non un point de départ genre :
- course--> compétition (avec soi, soyons clairs !  ;D) --> plus de mordant --> qu'est ce qu'il faut en plus pour aller plus loin ?

Par contre, si ce n'est pas une conséquence, on en revient à l'individuel, avant "formation", qu'il faut évaluer pour adapter l'enseignement.

Pour ce coup, et en ce qui me concerne, je ne suis certain de rien et je continue à pousser mes investigations, avec moi même et en observant mes stagiaires.

A+

Lockloc
"La chute n'est pas un échec, l'échec c'est de rester où l'on est tombé" - Socrate -

01 octobre 2013 à 16:59:50
Réponse #54

Manengus


 En relisant la discussion on voit qu'une partie des différents, notament sur l'évaluation, vient en partie de ce vers quoi tend l'ensemble Formation/évaluation.

 Il semble qu'un certain nombre ici on, ou on eu, a charge des formations professionnelles "avancée" et très concrètes/professionalisante.
 Ces formations semblaient avoir pour but l'inculcation d'un ensemble de savoirs "techniques" qu'il était impératif de savoir maîtriser. Une mauvaise maîtrise de ces techniques/procédures pouvait d'ailleur entraîner un danger important et direct pour l'élève/ l'entourage/ la collectivité.

 On l'a dit quelques fois, c'est un contexte particulier. Comme pour un stage de survie, les gens sont dans l'ensemble volontaire, majeurs, vaccinés, la formation s'étend souvent sur un temps assez cours...etc à l'inverse de l'enseignement scolaire primaire/collège/lycée/supérieur qui apparait comme l'autre pendant de "là où on enseigne".

 Peut être qu'on pourrait dégager plusieurs idéaux type de "cadres d'enseignement".

 - La formation qu'on appel souvent "continue". avant tout centrée sur du contenu technique, un public déjà diplomé, souvent adulte, conscentant, déjà "construits". Charge et/ou visée politique assez faible.

 - la formation "de vie". Très grossièrement l'Ecole. Apprendre un ensemble de savoir assez généraux, commun à tous, nécessaires à un gros ensemble de métier. Obligatoire et même vitale, incluant et excluant. Apprentissage ( de façon plus ou moins heureuse ) explicitement chargé de visées politiques fortes : exercice du vote, vivre ensemble etc.


 Après commes tous idéaux types on peut affiner un peu. Par exemple les études supérieures sont par nature à la croisée des chemins, formation dépassant parfois un aspect purement technique mais censée tout de même former à une profession assez précise, élèves adultes et consentant...mais pas tant que ça, lieu de vie et de socialisation dense, charge politique souvent présente....Dans la même idée certaines formation extrêmement professionalisantes et techniques comme l'ENA sont difficilement assimilable à un simple stage proffessionnel tant elle a pour but d'imprimer les esprits et les corps pour construire un modèle type ( d'administrateur en l'occurence ).

 Il serait cool d'identifier des élément structurant qui seraient capable de renseigner sur le type de "cadre d'enseignement" dans lequel on se trouve afin de sortire d'apories dans le genre "évaluer bien ou mal ?".

 Par exemple :

 Enseignement plutôt spécialisé / général ?
 Risques pour l 'élève / entourage / collectivité en cas de mauvaise formation
 Conséquences de l'échec et de la sortie de la formation pour l'élève
 Dimension politique de la formation
 Dimension sociale/socialisante

Cas concret

 Formation pour apprendre à piloter un avion.
  But : aller d'un point A à un point B avec un avion. Enseignement très technique spécialisé. Risques très élevés en cas de mauvaise formation. Conséquences peu facheuse en cas de sortie de l'élève. Dimension politique nulle ou presque nulle. Dimension social peu élevée
 >>>>nécessité d'une évaluation "classique" pour qu'on se retrouve pas responsable d'un gros titre facheux au JT dans 6mois.

 Parcours collège/lycée
 but : permettre au gamin de trouver sa place dans la société.
 Enseignement très général, et sur énormément de disciplines. Risques peu élevés en cas de mauvaise formation. Très grande gravité si l'élève se trouve exclu du dispositif. Dimension politique forte. Dimension sociale extrêmement forte.
>>>>>  Nécessité absolue de former tous les élèves, l'évaluation qui sanctionne peut être utile, mais si elle exclue alors on rate le but premier.

 Stage de survie
 But : permettre au gens de prolonger leur vie....mais pas que ?
 Enseignement spécialisé, mais aux principes larges. Risques éventuellement élevés mais non immédiat ( CF le pilote qui saurait pas conduire ). Peu de gravité si l'élève sort de la forma. Dimension politique et sociale potentiellement forte car on sent qu'il y a un "projet de vie" claire en dessous des techniques enseignées.
>>>>>>  A vous de voir  ;#


 

01 octobre 2013 à 18:09:57
Réponse #55

Bison


Bonjour,

Je reviens de vacances, et je tombe sur ce sujet, sur lequel beaucoup de choses ont été dites déjà.

Pas de quartier !
David est un néo soixante-huitard, telle est la conclusion qui s'impose d'elle même .

(Ceci est une attaque ad hominem, et je ne devrais pas, c'est sûr.
Mes confrères concierges vont me bannir, tant pis.)
;)

On trouve dans ce texte essentiellement une culpabilisation de l'enseignant en général, et une "sacralisation" du mauvais élève ... Le pauv' chou, c'est pas de sa faute s'il est nul et fainéant ...

J'en suis revenu, de mai 68 ...
Il y a des "mauvais élèves" dont les enseignants ne sont en rien responsables.
Le pire mal que l'on puisse leur faire c'est de leur mentir.
La pire hypocrisie, c'est d'éviter les évaluations, comme cela, on n'est même pas obligé de mentir ...

J'ai été un "mauvais élève" à une certaine époque.
Ma faute, la faute à un manque total de motivation, résultat d'une mauvaise orientation. D'excellents profs, des cours bien faits bien donnés, dont j'ai gardé bon souvenir (et aussi les livres et les syllabi), dont j'ai quand même retiré quelque chose.
Mais pas assez pour "réussir".
Je n'ai jamais pensé à contester le verdict des examens ratés.

Je sais que David évoque d'abord le cas des formations données par le CEETS, qui est un cas bien particulier. Mais il généralise aussi, un peu trop intempestivement.
(Cf. le terme "institution")

Je reprends les points qui me semblent le plus irréalistes
Citation de: David
6. Les évaluations, c’est de la m*rde.  La réalité donne des feedbacks beaucoup plus justes et constructifs…  d’où le double intérêt de l’approche « par projets » : les résultats sont immédiatement visibles, et si ça ne fonctionne pas du premier coup (ce qui est normal, toléré et intégré à la formation : on doit aussi apprendre à rebondir…  donc ENSEIGNER à rebondir), on peut directement analyser les causes et rectifier le tir, et ce jusqu’à ce que ça fonctionne (voir le point 2 !).  Le réel (et la tâche qu’on a confiée à un élève) sert de point de référence à l’évaluation, plutôt qu’une grille d’évaluation pondue par un esthète philosophe de salon qui n’a jamais vu un élève de sa vie.
D'abord, pourquoi les grilles d'évaluations seraient-elles nécessairement établies par des incompétents ? 
Triste a priori.
Ne peut-on imaginer que des grilles d'évaluation puissent être établies par des pros, et que les évaluateurs connaissent leur sujet ?
Tous mes profs connaissaient leur sujet, toutes leur questions étaient pertinentes et servaient à déterminer si on avait étudié, compris, retenu la matière de leurs cours. (Et croyez-moi, je me rends compte à quel point cet enseignement était bien fait, bien structuré).
Perso, en tant qu'examinateur en vol, je connaissais le sujet ...

"La réalité donne des feedbacks beaucoup plus justes et constructifs …"
Ça c'est évident.
Mais qui paie les pots cassés, dès lors que l'on en arrive à délivrer des qualifications / diplômes sans évaluation ou avec des évaluations bidons?

Ce refus de l'évaluation, c'est :

1. Le refus de déclarer un échec.

C'est faire l'autruche.
En Belgique, c'est carrément institutionnalisé. Ils appellent cela la politique de la réussite. Jusqu'au moment où cela devient sérieux et que le couperet tombe. Là cela fait mal, cela déboussole, cela compromet sérieusement le futur ...

2. La bonne excuse pour ne pas évaluer ni l'enseignement fourni, ni les enseignants.

Ainsi donc, en Belgique, on n'a pas de "Bac" ... de peur de mettre en évidence la piètre qualité de l'enseignement secondaire officiel. Tout le monde peut entrer à l'univ, où c'est l'hécatombe en première.

3. La flemme de mettre en place un système d'évaluation efficace.

Car là, il faut vraiment construire quelque chose qui soit en phase avec les objectifs déclarés et avec les moyens mis en œuvre. Un système d'évaluation efficace rend "la triche" plus difficile.
 _ _ _ _ _ _ _ _

En fait, on ne peut pas dissocier objectifs, moyens et vérifications.
Tout le monde profite de cette "vérification" !

Y compris l'enseignant, qui a ainsi le moyen de voir ce qui a été mal compris par trop d'élèves, de voir quelle question d'un QCM manquait de clarté etc.

C'est ma conviction profonde.
Un enfant qu'a pas une paire de bottes, une canne à pêche et un lance-pierre, c'est pas un vrai. (A. Gavalda)

01 octobre 2013 à 20:37:24
Réponse #56

DavidManise


:D

Alors triste constat, Marcel est un vieux con ;# (je déconne hein, t'es vieux, mais loin d'être con ;))...

Les évaluations c'est de la m*rde, je persiste.  Et je signe.  En revanche, ça ne veut PAS dire qu'il ne faille pas donner de feedback aux gens.  Je le fais en permanence...  mais pas besoin pour ça de faire une évaluation formelle.  On peut très bien voir en live quand les gens ont pigé ou pas.  Dans le doute, on pose 2-3 questions...  et on remet le couvert si nécessaire.

Le mauvais élève, par ailleurs, dans une instruction intégrée ou une approche par projet, il se pète les dents...  le truc qu'on remarque, simplement, c'est qu'il y en a moins.  Les gens réussissent mieux, en plus grand nombre. 

J'emmerde mai 68...  Rien à foutre de la bisounours attitude.  Je suis plutôt de gauche, hein, mais tu me catalogues d'une manière assez décevante, pour le coup.  Tu me fais dire des trucs que j'ai pas dits...  et tu me prêtes des manières de voir le monde qui me fond dresser le poil. 

Mais je t'aime bien quand même hein ;)

Les évaluations, c'est une solution de facilité, de contrôle plus aisé, de filtration pratique...  c'est CA la solution des grosses flemmes de mai 68.  L'approche intégrée, où les évaluations se font en temps réel, elle demande un vrai investissement des formateurs.  Minute après minute.

Les évaluations, c'est toujours artificiel.

Les évaluations, c'est toujours partiel.

Les évaluations, ça focalise tout le monde sur un résultat à un instant T, mais 5 ans après tout le monde a tout oublié...

Y'a PLEIN de bonnes raisons de dire que les évaluations c'est de la m*rde.  Et de me cataloguer "soixante-huitard" pour éviter de voir ça en face est juste tellement énorme que ça me fait rigoler.

Mais je t'aime bien quand même hein ;)

Ciao :)

David
"Ici, on n'est pas (que) sur Internet."

Stages survie CEETS - Page de liens a moi que j'aimeu

01 octobre 2013 à 22:13:10
Réponse #57

Ladeuc


Je m’incruste dans le débat sans en avoir lu l'intégralité donc si je suis hors sujet je m'en excuse...
Simplement pour une fois je peux apporter un peu de mon savoir quelque part alors je me permets de poster qqchose ,en explicitant bien le fait que je ne me range dans le camps de personne.

Ayant pas mal étudié la psychologie sociale... de l'éducation... expérimentale... etc ,une chose s'en est dégagée ,un fait que même les profs nous ont toujours confirmé : l'évaluation (en tout cas sur l'aspect : élève/prof/cours) est une des pires méthodes pour conclure du niveau de qqcn.
Toutes les expériences/études depuis le commencement sur la notation ont prouvé à CHAQUE FOIS que c'est une technique ne rendant compte non pas des réelles compétences d'un individu mais simplement ce qu'il a produit à un moment précis : de cette manière là ,le contexte ,la pression ,le stress ,l'histoire du sujet et toute sa singularité au moment de l'examen ,sont bannis.

Entre autre et pour faire plus simple ,la notation permet uniquement de savoir ce que "vaut" un élève dans le contexte où il passe son évaluation.

Dans certains pays ,les étudiants n'ont pas d'examens à la fin de leur année... ils finissent par avoir leur diplôme quoiqu'il arrive car le "challenge" ne se trouve pas dans le fait d'apprendre des connaissances ,mais de réussir des performances dans le boulot qu'ils auront plus tard !
Autrement dit ,ils ont tous leur diplôme à la fin ,mais dès le départ ils savent que leur patron sera inflexible et ainsi c'est à eux de se prendre en main dès le début de leur scolarité pour pouvoir prouver plus tard ,dans le milieu professionnel ,qu'ils savent faire ce que leur métier leur demande.

Bon je sais pas si ça a fais avancer le débat d'une quelconque façon ,comme je l'ai dis je suis peut être même pas dans le sujet mais j'ai donné mon avis sur ce que j'ai compris :)

01 octobre 2013 à 23:20:56
Réponse #58

moss


Les évaluations c'est de la m*rde, je persiste.  Et je signe.  En revanche, ça ne veut PAS dire qu'il ne faille pas donner de feedback aux gens.  Je le fais en permanence...  mais pas besoin pour ça de faire une évaluation formelle. 
...
Les évaluations, c'est une solution de facilité, de contrôle plus aisé, de filtration pratique...  c'est CA la solution des grosses flemmes de mai 68. 
...
Les évaluations, c'est toujours artificiel.
...
Les évaluations, c'est toujours partiel.
...

désolé david, mais je ne comprends pas pourquoi tu te focalises comme ça. les évaluations n'existent pas pour elles-mêmes. elles ne sont là que pour répondre à des besoins précis des formateurs et des élèves.

tu le dis d'ailleurs toi-même "on peut le voir en live quand les types ont pas pigé", donc tu pratiques une évaluation corrective (qui permet de s'assurer de la progression de l'élève, et éventuellement d'adapter l'enseignement ou de recadrer l'élève).

personne n'a jamais dit qu'évaluer c'était faire une interro écrite. j'en discutais encore avec deux instructeurs hier : durant un module de formation pratique ils suivent un élève pendant des séances de 30min à 3h. ils ont chacun une fiche papier avec un certain nombre de compétences à valider, ils cochent "à acquérir" "en cours d'acquisition" "acquise" suivant ce que montre l'élève. c'est la même chose que toi, avec un formalisme un peu plus fort pour différentes raisons. quant au stress que peut avoir l'élève, c'est le boulot de l'instructeur d'en tenir compte. et d'une certaine façon, savoir gérer son stress peut aussi faire partie des compétences à avoir.

je le répète encore une fois, on n'évalue pas une personne mais des savoir, savoir faire, savoir être. alors forcément ça donne une vue à un instant T, mais on ne leur demande pas autre chose.

quand un élève obtient son diplôme d'ingénieur, ça ne veut pas dire que ça fera un bon ingénieur mais uniquement qu'il atteint un certain nombre de compétence dans différents domaines.
idem, si je croise un jeune de 16 ans dans la rue, je suis incapable de dire si ce sera un chercheur qui découvrira le vaccin contre le cancer, ou s'il sera caissier chez carrouf toute sa vie. par contre je peux évaluer son niveau en français, math, physique.

quand tu certifies un type à la fin d'un stage, est-ce que tu peux dire ce que ce même type sera devenu 5 ans après ? (regardes karto #)) ça ne veut pas dire pour autant que ton diplôme est inutile, juste qu'il n'est pas là pour juger le bonhomme mais le niveau de certaines de ses compétences.

pour ladeuc,  critiquer le diplôme c'est comme pester contre le thermomètre. si chacun reçoit un diplôme au bout de la formation, à quoi ça sert d'aller à l'école ? tu as des tas de personnes qui ont étudier depuis chez elles et qui s'en sont aussi bien sorti. encore une fois, ce petit bout de papier ne sert qu'à valider l'atteinte d'un certain niveau.

un point très important : c'est une chose d'ingérer plus ou moins de force des connaissances pendant un stage, c'est loin d'être fini pour l'élève. il faut qu'il les digère, qu'il se les approprie, et finalement qu'il prenne du recul, de la hauteur. et ça, ça demande du temps, de la pratique, etc... il y a des connaissances qui ne s'acquièrent pas par des stages, des cours, ou des conférences, il n'y a que le temps, l'expérience, la confrontation à la réalité qui permettent de les approcher. et d'ailleurs, ce n'est pas du tout évident à transmettre, tu dois en savoir quelque chose...
c'est un gros souci dans les entreprises, où ça représente un important capital intellectuel, difficile à formaliser mais indispensable au fonctionnement : voir [urlhttp://fr.wikipedia.org/wiki/Connaissance_tacite]connaissance tacite[/url]. on dit que certains outils 2.0 facilitent la circulation de ces connaissances (comme les rse : réseaux sociaux d'entreprise) en permettant l'échange de l'expérience

la grande question, c'est surtout la qualité des évaluations mises en oeuvre. c'est par exemple le problème du bac, l'évaluation est pensée pour répondre à des besoins de comms politiques (il faut que 90% de la population ait son bac, etc...)

si j'ai évoqué les différentes formes d'évaluations (corrective, sommative, prédictive, etc...) ce n'est pas pour étaler de la confiture. chacune répond à un besoin particulier (est ce que le stagiaire à les prérequis avant le stage, est-ce qu'il suit bien, est-ce que le stage est adapté au besoin, etc...). et à chaque type d'évaluation correspond un ou plusieurs outils (qcm, entretien, rédaction d'un texte, épreuve pratique, entretien, etc...)

d'ailleurs la démarche par projet dont tu parles david, est à mon avis plus une forme d'enseignement que d'évaluation (mais là je pinaille). comme toujours, elle a ses avantages et ses inconvénients.

par contre, il ne faut pas rêver, une bonne évaluation c'est toujours coûteux (soit à construire, soit à mettre en oeuvre). et même si c'est un peu HS, vu tout ce qu'enseigner implique, j'ai du mal à croire qu'on puisse faire ça toute sa vie, ou il faut être sacrément costaud...
« Nous sommes dans la m*rde, mais ce n'est pas une raison pour la remuer.  »
Marcel Bigeard

« La fin de l’espoir est le commencement de la mort.  »
Charles de Gaulle

02 octobre 2013 à 00:30:56
Réponse #59

Ely



Raah, mais pourquoi je découvre ce thread tard le soir alors que j'ai encore du taf?!

Juste deux petites remarques sur la polémique, parceque je ne peux pas résister:

  • On regroupe beaucoup de choses derrière le terme d'évaluation, et quand la terminologie reste floue, c'est trop bien, le débat est flou aussi. L'effet qui est prouvé à répétition et depuis des années par les études en socio/psy (*), c'est que la notation a des conséquences néfastes, en transformant une motivation intrinsèque (envie/besoin d'apprendre) en une motivation (a) extrinsèque (envie/besoin de note/jugement) et (b) très souvent faussée par les biais de l'examen (certains sont bien conçus et évaluent la compréhension et non le "par-coeur" : ils demandent bien plus de ressources mentales de la part des concepteurs; et sont malheureusement minoritaires).
  • Si on veut continuer à parler d'évaluation, on trouvera à peu près autant de papiers mettant en évidence l'effet positif du feedback, que ce soit pour l'apprenant-élève ou l'apprenant-enseignant. Une certaine forme de feedback cependant. Moi, je dirais: fait avec générosité et sans but de contrôle... 'fin faut des êtres humains déjà bien réveillés pour avoir ça tout le temps ;)

(*) Le premier nom qui me revient en tête, parcequ'il est trop tard pour sortir une biblio, c'est Alfie Kohn, qui est un poil controversé mais qui cite ses sources et est cité par la nouvelle génération. On trouve aussi ce vocabulaire dans des manuels de management et dans les présentations de l'unschooling si on veut d'autres  approches :)


...Et sinon, à part ça, ya des gens on a beau leur expliquer, leur montrer, leur faire essayer, leur faire faire les erreurs, leur ré-expliquer, faire des dessins, ils comprennent toujours pas... La remise en question du prof, ça va bien quelques semaines, mais des fois faut bien admettre que c'est les autres qui sont cons :P
(tout rapprochement avec une expérience récente voire vieille de quelques heures serait complètement fortuit ^^)



02 octobre 2013 à 01:22:32
Réponse #60

oli_v_ier


Ne jamais répondre à une question que l'autre ne se pose pas.
C'est pour moi une clé de l'enseignement ou de la formation.

Tu peux expliquer/montrer ce que tu veux, si l'autre n'a pas envie de le savoir/voir, c'est mort :) .

Pour la mémorisation, raconter, dire, montrer à quelqu'un ce qu'on a appris (sans par coeur bien sûr), c'est ultra-efficace.

02 octobre 2013 à 09:10:44
Réponse #61

Bison


Citation de: David
Alors triste constat, Marcel est un vieux con  ;#
C'est exactement ce que les jeunes excités de 68 disaient de leurs "anciens"  ;# ;#

Sérieusement, il y avait de biens belles idées dans les slogans de 68, mais pas très réalistes. C'est-à-dire :  excessivement difficiles à appliquer dans la vie réelle.

N'empêche, "on" n'arrête pas d'en remettre une couche.
"Il n'y a pas de voie royale vers la géométrie"
Mais il est plein d'utopistes qui pensent encore que tout le monde peut y arriver.

Un exemple frappant :  les formations PSC1 - du moins celles que j'ai suivies.
On y assiste par intérêt personnel, ou bien parce que c'est un prérequis à l'exercice de certaines fonctions.
Dans les deux cas, pas d'évaluation, tout le monde obtient son attestation.

Ce que j'ai vu, aussi bien en France qu'en Belgique : 
 - un programme baclé, bien en dessous du minimum requis en terme d'heures de cours;
 - des formateurs prenant les choses avec peu de conscience professionnelle
 - des participant parfois somnolents

Hors, quand on parle d'un "minimum" d'heures à consacrer à tel ou tel enseignement, que ce soit pour le PSC1 ou pour une qualification de type sur un avion de ligne, il s'agit bien d'un minimum.
En moyenne, dans la vie réelle, il faut 50% de temps en plus pour atteindre le niveau requis, et il faut encore accepter un certain pourcentage d'échec.

Seule une évaluation sérieuse permet d'arriver à ce constat et de garantir qu'un enseignement ne se dégrade pas par estompement de la norme.

Bon, je n'ai pas tout dit à propos de l'évaluation ...

Les "examens" ...

À mon sens, le moyen le plus efficace pour forcer un effort de révision générale, de synthèse et de mémorisation des points clés. Bref d'appréhender une matière ou une technique dans sa globalité.

Un examen raté ... ben celui qui se sent vexé, dévalué ... dommage pour lui, mais en pratique, il y a toujours une sacrée leçon à en tirer.

Un examen réussi :  super encouragement à persévérer, surtout quand la réussite résulte d'un travail important.

L'évaluation continue

J'ai subi et pratiqué depuis 1971.
Y compris l'auto-évaluation en équipage.

Efficace autant pour maintenir le niveau que pour progresser.

Au niveau des "leçons" proprement dites :  fiches de progression et notes de briefing / débriefing
Indispensables, tout simplement ... et, bien entendu, ouvertes à l'élève.

Sélection

Tout aussi indispensable.

Sélection/filtre à l'entrée, sélection en cours de formation.
Inutile de faire perdre son temps et son argent à des candidats qui n'y arriveront de toute évidence pas ...

Bon, on n'éjecte pas quelqu'un d'une formation sans un sérieux motif, sans une discussion sérieuse avec la personne concernée, pour voir/comprendre ses difficulté, évaluer les chances d'arriver ou non à les surmonter, sans contre-avis ...

J'ai rencontré dans ma carrière des anciens pilotes militaires.
Des "confirmés" : tous des mecs solides en qui on pouvait avoir confiance ...  de sacrés survivors ...
Des "éliminés" en cours de formation (parfois à un stade avancé), malgré le filtre sévère à l'entrée (test psychotechniques sophistiqués) :  tous des mecs qui auraient fini par se tuer en escadrille ... leur élimination leur a sauvé la vie, même si l'un d'eux a fini par se tuer dans le civil.

Les diplômes

Profession de foi sous forme d'une vieille chanson ...

Le bagne est un insigne
Qui montre à tout venant
Que l'porteur en sa ligne
Est un scout épatant
Et qu'il est prêt à faire
Son métier pour vous plaire

S tu veux des badges
Faut les préparer
Si tu veux des badges
Faut les mériter.

Remplacer "badge" - insigne de compétence particulière - par diplôme
:love: ce vieux con de militaire :  Baden Powell.

Le badge/diplôme/certificat de compétence est lié à l'évaluation, et engage celui qui accorde le diplôme en question.
_ _ _ _ _

Voilà, perso je n'ai jamais eu de grande théories en pédagogie, juste de la pratique et de l'empirisme ...

Je rejoins David sur deux points importants :

L'importance de la perception "corporelle" des concepts.

Voir, entendre, toucher, sentir, ressentir, expérimenter ...
À défaut de vraie perception physique, les dessins, films et animations peuvent aider à bien comprendre et à bien mémoriser les choses.

Voir les micro-organismes et les bactéries au microscope, expérimenter l'action des filtres, des cachets, de l'ébullition ...
A défaut, avoir un film bien fait sur le sujet.
A défaut avoir une doc papier bien illustrée ...

C'est mieux que du simple texte disant que les filtres 0,3 µ laissent passer les virus et les plus petites bactéries. C'est mieux qu'une notice disant qu'il faut deux à trois heures aux µpures pour éliminer les plus grosses bestioles ...

Montrer l'action (le mode d'attaque) des µpures pour expliquer cela, c'est encore mieux.

Citer
L'importance des bases

"Back to basics" ...
"Une tête bien faite vaut mieux qu'une tête bien pleine"
"Apprendre à apprendre"

J'adhère pleinement.

Un examen raté, quand cela ne relève pas du manque de travail, cela relève à tous les coups d'une faille au niveau des bases, des "prérequis". C'est cette faille qu'il faut découvrir avant d'entamer un "rattrappage" sur la matière proprement dite.

Voilà, j'ai tout sorti

« Modifié: 02 octobre 2013 à 10:45:44 par Bison »
Un enfant qu'a pas une paire de bottes, une canne à pêche et un lance-pierre, c'est pas un vrai. (A. Gavalda)

02 octobre 2013 à 09:36:17
Réponse #62

DavidManise


Dans certains pays ,les étudiants n'ont pas d'examens à la fin de leur année... ils finissent par avoir leur diplôme quoiqu'il arrive car le "challenge" ne se trouve pas dans le fait d'apprendre des connaissances ,mais de réussir des performances dans le boulot qu'ils auront plus tard !
Autrement dit ,ils ont tous leur diplôme à la fin ,mais dès le départ ils savent que leur patron sera inflexible et ainsi c'est à eux de se prendre en main dès le début de leur scolarité pour pouvoir prouver plus tard ,dans le milieu professionnel ,qu'ils savent faire ce que leur métier leur demande.

C'est un peu -- entre autres -- ça que je voulais dire par "la réalité donne un feedback beaucoup plus utile". 

Dans les faits, on espère que les diplômes soient une preuve de compétence, et que les mecs qui l'ont vont pouvoir faire leur job dans le monde de l'entreprise.  La réalité c'est que la vraie formation commence APRES L'EMBAUCHE et que, au mieux, le diplôme permet d'avoir un a priori positif sur les compétences de quelque sans trop trop de risque de se planter. 

Mais dans les faits, hein...  bon.

Qu'on filtre les individus qui clairement ne sont pas suffisamment bons avant de leur donner le label "formé", c'est indispensable aussi.  Je ne voudrais pas me faire opérer par un mec qui ne connait pas son boulot et je dois avoir un moyen de mettre des chances de mon côté...  mais il faut comprendre que, dans les faits, le diplôme ne garantit rien, qu'il n'a jamais rien garanti, et que c'est au pied du mur qu'on reconnaît le maçon.

Ciao ;)

David
"Ici, on n'est pas (que) sur Internet."

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02 octobre 2013 à 09:36:59
Réponse #63

DavidManise


C'est exactement ce que les jeunes excités de 68 disaient de leurs "anciens"  ;# ;#

C'est vrai ;#

m*rde...  tu m'as eu là...  ;#

;)

David
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02 octobre 2013 à 09:42:03
Réponse #64

moss


mais il faut comprendre que, dans les faits, le diplôme ne garantit rien, qu'il n'a jamais rien garanti

c'est ce que j'ai essayé d'expliquer : le diplôme ne garantit pas que le gars est compétent sur les tâches pour lesquelles on l'embauche, juste qu'il a acquis un certain nombre de savoirs (théoriques ou pratiques). ça ne veut pas dire qu'il soit apte au travail, mais quand tu as une embauche à faire ça peut servir de premier filtre (mais c'est loin de tout faire)
« Nous sommes dans la m*rde, mais ce n'est pas une raison pour la remuer.  »
Marcel Bigeard

« La fin de l’espoir est le commencement de la mort.  »
Charles de Gaulle

02 octobre 2013 à 09:49:28
Réponse #65

bison solitaire


Puisqu'on est en plein débat, j'ai retrouvé ce lien:

http://www.socialearning.fr/nos-actualites/163-apprentissage-formel-ou-informel

Ca parle de ce paradoxe entre le constat "meilleure" façon d'apprendre/investissement.
Caricaturalement: l'efficacité d'une formation formelle (la plupart de qu'on connait) est d'environ 10%, mais elle absorbe 80% du budget dédié à la formation...

02 octobre 2013 à 09:59:03
Réponse #66

DavidManise


personne n'a jamais dit qu'évaluer c'était faire une interro écrite. j'en discutais encore avec deux instructeurs hier : durant un module de formation pratique ils suivent un élève pendant des séances de 30min à 3h. ils ont chacun une fiche papier avec un certain nombre de compétences à valider, ils cochent "à acquérir" "en cours d'acquisition" "acquise" suivant ce que montre l'élève. c'est la même chose que toi, avec un formalisme un peu plus fort pour différentes raisons. quant au stress que peut avoir l'élève, c'est le boulot de l'instructeur d'en tenir compte. et d'une certaine façon, savoir gérer son stress peut aussi faire partie des compétences à avoir

Ok, je veux bien admettre qu'il existe des évaluations moins c*nnes, et des manière de donner du feedback sur ces évaluations là qui soient plus constructives.

Tu m'as convaincu, et je vais donc adoucir un peu ma position en reformulant : "les évaluations classiques, sélectives, discriminantes et formelles, c'est de la m*rde"...

Ca serait mieux comme ça ? ;)

Citer
je le répète encore une fois, on n'évalue pas une personne mais des savoir

Oui...  ça, TOI tu le sais.  Parce que tu es du côté du formateur.  Va dire ça à un gamin de CE1 qui a une confiance en lui vacillante, qui se fait taper dessus à la maison et qui reçoit une dictée toute barrée de rouge avec une note minable, et qui sait qu'il va devoir la faire signer et se faire rabaisser, traiter de con et se faire dire qu'il ne fera rien de bon dans la vie...

La vérité c'est ça, aussi.  Se focaliser sur l'évaluation, c'est oblitérer complètement des parties du problème.

Tout ça, en fait, c'est une question d'être honnête et explicite sur les objectifs qu'on se donne en tant que formateur...  et sur la conscience qu'on a ou pas de la complexité humaine, sociologique, hormonale, sociale, etologique, etc. qu'on en en face de nous...  ou plus exactement autour de nous et à côté de nous quand on cherche à faire progresser quelqu'un.

J'ai eu beaucoup, beaucoup de mauvais profs.  Les bons que j'ai eu, les rares vraiment bons, ils y mettaient du temps, de l'amour, beaucoup d'humilité, beaucoup de respect...  Y'a un de ces mecs là, un prof de chimie, qui m'a vu un jour alors que j'avais 15 ans picoler dans un bar...  il aurait pu me mettre deux baffes ou faire une déclaration aux services sociaux, ou me cataloguer.  Au lieu de ça, il est venu, il a fait un truc parfaitement illégal : il m'a payé une bière.  On a papoté d'une manière qui m'a donné l'impression que c'était d'homme à homme, sur le coup.  Et il m'a juste dit que si j'avais besoin d'un coup de main, je pouvais lui demander et qu'il ferait de son mieux.

Le lendemain, j'ai continué à sécher tous mes cours...  sauf le cours de chimie.  Et petit à petit, je me suis raccroché au système.

Ce mec la m'a sauvé la vie...  en faisant absolument tout l'inverse de ce qui était justifiable de faire.  Et j'ai fini avec bac + deux décimales, avec un chemin tout tracé, un salaire et une bagnole de fonction...  voie que j'ai décidé de quitter pour suivre une petite journaliste française qui avait des seins magnifiques :D

Bref.

Tout ça pour dire qu'il y a des millions de raisons pour sortir des modèles normatifs, et peu de raison pour les garder.  Je pense qu'il faut donner du feedback aux gens, mais différemment.  Il faut les aider à progresser en ayant une vision plus ouverte, plus flexible, plus libre...  Les évaluations classiques comprennent PLEIN d'effets secondaires très néfastes, et il faut, comme les médicaments, les utiliser avec parcimonie. 

C'est ce que je pense.

Pester contre le diplôme, ça n'est pas râler contre le thermomètre.  C'est être conscient du fait que si on sait la manipuler, une photo peut mentir...  C'est être conscient (comme tu l'es toi, Moss) des limites du bout de papier, ce que les gens n'ont forcément pas tous, pas souvent en tête...

Est-ce qu'une évaluation intelligente, dans certains cas, peut être utile ?  Oui.  Mais c'est devenu une solution de facilité, je trouve, pour éliminer certains élèves sur lesquelles les formateurs se cassent le nez. 

J'ai TELLEMENT d'exemples de gens superbement brillants mais inadaptés au format, qui sont recalés, jetés comme des merdes et dont la société se prive...  j'ai tellement d'exemples, à l'inverse, de TROUS DU CUL INCOMPETENTS qui ont su se mouler, lécher les bons culs et sucer les bons égos, et qui se retrouvent diplômés, dans des postes de pouvoir, dans des postes où ils peuvent réellement nuire par leur incompétence ou leur malveillance... 

Il faut BIEN, mais alors TRES BIEN définir nos objectifs.  En tant que formateurs...  en tant que société aussi.  Parce que, on a trop tendance à l'oublier...  c'est étroitement lié.

Ciao ;)

David
"Ici, on n'est pas (que) sur Internet."

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02 octobre 2013 à 10:01:10
Réponse #67

bison solitaire


Je livre aussi les derniers paragraphes d'un article de Thierry Hostettler à propos du choix de la méthode pédagogique utilisée par l'école de police Suisse (approche par le compétences):

"Il n'existe aucune objection fondamentale qui pourrait "mettre à mort" le choix d'une approche par les compétences. Trois obstacles prévisibles doivent cependant être pris en compte dès le début:
- les craintes des responsables politiques et des responsables opérationnels de la formation de police. L'ingénierie d'une approche par compétence requiert un grand travail analytique en amont. Ce travail ne peut pas être réalisé exclusivement par la police: il nécessite une collaboration avec des spécialistes en référentiels de compétences.
- les résistances internes de la part des instructeurs-formateurs. Ces derniers devront changer leurs représentations et leurs pratiques. Comment amener des enseignants habitués à "donner des leçons" à repenser leur métier? Ils ne contribueront à développer des compétences qu'à la condition de se percevoir comme organisateurs de situations didactiques et d'activités qui ont du sens pour les aspirants, les impliquent, tout en engendrant des apprentissages fondamentaux.
- La déconstruction-reconstruction des pratiques d'évaluation. On ne formera des compétences dans l'école de police que si l'on exige des compétences au moment de la certification. L'évaluation est le vrai programme, elle indique "ce qui compte". Il faut donc évaluer des compétences, sérieusement. Mais cela ne saurait se faire par des tests papiers-crayons. On peut s'inspirer des principes de l'évaluation authentique élaborés par Wiggins (1990)."

02 octobre 2013 à 10:19:17
Réponse #68

moss


je comprends mieux ton point de vue, je pense que c'est juste une histoire de formulation. ce n'est pas un problème d'outils (évaluation dans ce cas) mais de profs qui ne savent pas, ne peuvent pas, ou ne veulent pas les employer correctement...

est ce que l'école fait du dégât sur certains jeunes ? sans aucun doute... est ce ne pas les évaluer résoudrait les problèmes ? pas du tout à mon avis. mais mettre en place les moyens pour les sortir de l'ornière sont très coûteux (humainement, financièrement) et là on touche à des aspects politiques.

est-ce qu'il y a des jeunes pour qui l'école n'est pas le bon cadre ? sûrement, c'est pour cela qu'en théorie il y a les formations professionnelles (bep, cap, etc.) mais elles sont tellement dévalorisées qu'elles ont souvent perdu toute valeur... pour avoir pu comparer (un peu) les systèmes scolaires français et québécois, la grosse différence que je retiendrais c'est qu'au québec le prof est moins dans la position du maître de conférence qui daigne dispenser son savoir (bon, je sais, je caricature un peu). je trouve qu'il y a une relation plus naturelle et équilibrée, mais je pense que c'est aussi une différence culturelle entre nos deux sociétés


La réalité c'est que la vraie formation commence APRES L'EMBAUCHE

ce point là est justement très intéressant. comment on capitalise ce savoir ? quand un type qui a 20 ans d'expérience quitte une petite boite, ça peut la mettre à mal, comment on s'en protège ? mettre en place du tutorat interne ?
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Marcel Bigeard

« La fin de l’espoir est le commencement de la mort.  »
Charles de Gaulle

02 octobre 2013 à 10:41:25
Réponse #69

Claude Ponthieu


L'enseignement, doit-il être au service des attentes de la Société ou doit-il servir au développement de l'Individu ?

On trouve dans ce texte essentiellement une culpabilisation de l'enseignant en général, et une "sacralisation" du mauvais élève ... Le pauv' chou, c'est pas de sa faute s'il est nul et fainéant ...

J'en suis revenu, de mai 68 ...
Il y a des "mauvais élèves" dont les enseignants ne sont en rien responsables.
Le pire mal que l'on puisse leur faire c'est de leur mentir.
La pire hypocrisie, c'est d'éviter les évaluations, comme cela, on n'est même pas obligé de mentir ...

J'ai été un "mauvais élève" à une certaine époque.
Ma faute, la faute à un manque total de motivation, résultat d'une mauvaise orientation.

En un mot, qu'est-ce qu'un bon ou mauvais prisonnier ?  :lol:


Quelle est la priorité ?
La contrainte ou comment asservir un individu par un formatage en bon et due forme, car c'est de cela qu'il s'agit.

Jean-Baptiste de La Salle a œuvré pour que les pauvres puissent se libérer du joug de leur asservissement aux Castes, par essentiellement l'apprentissage de l'écriture.
Jules Ferry a rendu l'école obligatoire pour endoctriner les individus — endoctrinement masqué par la gratuité.
Lire la biographie de Jules Ferry, sur les besoins de l'ère industrielle, le pourquoi du besoin de revanche de 1870, sur le contenu des cours de l'époque et sur la nécessité de lobotomiser la future chaire à canon de 14-18.

Investi de son autorité, l'enseignant/formateur se veut être responsable, mais cette autorité est-elle vraiment sienne ?

Notre choix pédagogique dépend de notre degré de conscience des enjeux, de notre motivation à enseigner et que cela sous-tend.
Nous avons eu une culture riche en expérience et pauvre en information.
Aujourd’hui, nous sommes riches en information, mais au seuil de pauvreté de l’expérience réelle.

02 octobre 2013 à 11:05:08
Réponse #70

DavidManise


ce point là est justement très intéressant. comment on capitalise ce savoir ? quand un type qui a 20 ans d'expérience quitte une petite boite, ça peut la mettre à mal, comment on s'en protège ? mettre en place du tutorat interne ?

Ca se fait en interne, de manière informelle, et dans la durée.

Le défi d'une bonne formation, donc, est de faire ça plus vite, en choisissant mieux les points les plus indispensables, et en laissant une marge pour plein de trucs qu'on ne contrôlera pas.  Volontairement pas.

Je vois là un parallèle avec le close combat qui, au lieu d'essayer de modifier des réactions de défense câblées en dur dans notre corps (flinch response, dans le jargon), cherche à capitaliser sur ces gestes déjà présents, une bonne pédago ne va pas contre notre manière "naturelle" de transmettre.  Elle capitalise dessus.

Les évaluations, concrètement, ne servent pas vraiment à instruire les gens.  Elles servent à détecter ceux à qui on n'a pas réussi à instruire, et qui doivent être giclés du système...  Le feedback sur notre propre boulot de formateur et sur les manières d'aider au mieux les gens peut être obtenu de plein d'autres manières moins traumatisantes et plus efficientes.  Et le feedback donné aux apprenants peut être donné de manière plus constructive et plus utilisable.

Donc autant appeler un chat un chat. 

Moi, avant de valider le certificat d'un moniteur CEETS, je le fais passer par plein de filtres.  Je lui tends même plein de pièges comme un gros enc**é de chacal, dont le but est de détecter des problèmes, des biais, des comportements à risque, etc.  Et sur 100 personnes qui me font un mail pour devenir moniteurs, il en ressort à l'autre bout environs 1.

Mais je distingue la formation de la sélection.  C'est deux activités complètement opposées.

David
"Ici, on n'est pas (que) sur Internet."

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02 octobre 2013 à 11:24:13
Réponse #71

moss


Les évaluations, concrètement, ne servent pas vraiment à instruire les gens.  Elles servent à détecter ceux à qui on n'a pas réussi à instruire, et qui doivent être giclés du système...  Le feedback sur notre propre boulot de formateur et sur les manières d'aider au mieux les gens peut être obtenu de plein d'autres manières moins traumatisantes et plus efficientes.  Et le feedback donné aux apprenants peut être donné de manière plus constructive et plus utilisable.

ce dernier point est faux, c'est le centre de notre incompréhension. il y a des évaluations, chacune a des buts différents, la plupart n'ont absolument pas pour but d'exclure l'élève d'un parcours de formation ou de faire une sélection, mais au contraire de l'aider à avancer (quand elles sont bien utilisées évidemment)

tu le fais toi même, peut être sans t'en rendre compte.  quand tu parles de filtre, tu fais une évaluation. par contre l'évaluation peut très bien être transparente pour l'élève. tu le regardes pratiquer, tu le mets dans certaines situations, tu lui tends un piège, et tu regardes ce qu'il fait, comment il réagit. tu en déduis des failles éventuelles, des biais, etc. et tu corriges (en étant plus ou moins directif, c'est le feedback dont tu parles).

dire à un stagiaire qu'il a une note de zéro et qu'il est nul est bien sûr complètement abherrant. mais la faute n'est pas à l'évaluation mais à l'instructeur qui prend de mauvais outils (une note c'est pour classer des élèves, là ça n'a aucun intérêt), qui n'a aucune pédagogie (on ne juge pas une personne ie t'es nul, mais sa progression : ça tu as compris, mais pour ça c'est pas bon, il faut que tu travailles telle ou telle chose)

là encore, il ne s'agit pas de mettre en place des usines à gaz, la plupart des instructeurs feront tout ça naturellement, sans même s'en rendre compte. parfois il faut juste formaliser pour s'assurer que tous les instructeurs soient cohérents entre eux. même ça, ça peut être un simple débriefing de l'équipe de formation en fin de journée ou de stage. mais j'imagine que ce sont des pratiques courantes...

si on se croise un jour, il faudra qu'on en parle, ce sera plus simple...
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Marcel Bigeard

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02 octobre 2013 à 11:29:20
Réponse #72

Manengus


L'enseignement, doit-il être au service des attentes de la Société ou doit-il servir au développement de l'Individu ?

 Les deux mon capitaine !  :) ( et oui en plus c'est possible ).

 Je me permets de salement faire auto référence à mon dernier message, mais là on est encore dans le même problème sans issue, focalisé autour de l'évaluation et de son apport pour l'enseignement. Sauf que l'enseignement n'existe pas. Il n'y a que des moment d'un parcours de vie où l'individu sera soumis à une phase d'enseignement. Pour prendre des références citées ici, la petit CE1 qui apprend à lire n'a presque rien en commun avec le mec de 25 ans qui veut être performant en apnée. Son enseignement non plus.

 Je ne vais pas réécrire le pavé de la page précédente mais on voit bien, et Claude le souligne encore, qu'il y a une partie de l'enseignement qui est destiné à l'appropriation de techniques très spécialisées quand l'autre participe au fondement de notre société occidentale.  Je pense qu'il serait vraiment utile d'essayer de faire ressortir différents archétypes ( qui pourraient être supérieur à deux...CF mon premier message again ) afin de sortir du cadre rigide dans lequel on essaye, en vain, de faire rentrer ET l'enseignement ET l'évaluation.

 Aussi, concernant la sacralisation du mauvais élève et l'incrimination du prof. Il ne s'agit pas de dire que l'élève n'est pas mauvais, il s'agit de dire qu'il n'est pas mauvais intrinsèquement. Que ce soit au niveau de sa motivation ou de ses "performances" quelque chose a pu rater à un moment donné, mais ce quelque chose peut TOUJOURS être inversé. Pour le professeur il ne s'agit pas de dire que c'est un horrible fonctionnaire psychorigide, mais qu'entre un gamin de 15 ans un peu borderline et un mec de 40ans dont c'est le métier il est certainement plus productif d'attendre un geste pondéré et mature de la part du second. Simple question d'aller au plus efficace en fait.

02 octobre 2013 à 11:30:10
Réponse #73

moss


j'ai ouvert un post sur la capitalisation des savoir faire ici pour ceux que ça intéresse...
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02 octobre 2013 à 12:00:43
Réponse #74

moss


il y a une partie de l'enseignement qui est destiné à l'appropriation de techniques très spécialisées quand l'autre participe au fondement de notre société occidentale. 

faudrait peut être pas abusé non plus. tu crois vraiment que c'est l'école qui formatte les gens ??? ça serait peut être bien aussi de ne pas oublier que les profs ne sont pas des éducateurs, c'est pas à eux d'ouvrir les gamins à la vie. ils ont des parents pour ça...
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