Salut,
J’ai eu un de ces derniers soirs l’occasion de participer à un micro-stage (1 H 30) de Karaté Défense System :
http://www.karatedefensesystem.fr/, donné par le fondateur de ce système, Christian Panattoni.
Le stage se passait dans un dojo de la périphérie rennaise, à l’initiative d’un club de Karaté local, les clubs du coin affiliés à la FFKDA étant invités à participer, avec à l’arrivée malgré la période de vacances une quarantaine de participants… La plupart avaient troqué leurs vestes de karategi pour des t-shirts noirs, les animateurs ou habitués du KDS présents avaient en plus des pantalons spécifiques, des protège-tibias et des chaussures de salles.
1H30, soit encore un peu moins de temps utile en pratique, c’est évidemment beaucoup trop court même pour une découverte, et ceci atténue nécessairement la portée utile de ce petit compte-rendu.
Christian Panattoni, 7e Dan FFKDA, directeur technique de la ligue de Karaté d’Aquitaine, et sa compagne dans la vie Evelyne Gominet, 5e Dan FFKDA, étaient les animateurs de cette « initiation ».
C. Panattoni a été gendarme pendant apparemment une quinzaine d’années et a notamment travaillé en groupe d’intervention (PSIG, je suppose). Il commence par présenter le contexte dans lequel est né le KDS : à partir d’une volonté de la FFKDA, dans une volonté plus générale de « redonner du sens au mouvement », de remettre en évidence l’application « défense » du Karaté, un travail fédéral a démarré, dont deux branches seraient issues en parallèle : celle de Panattoni, avec le KDS, celle par ailleurs du «Karaté Défense Training », plus récemment arrivé sur le marché (avec apparemment Giovanni Tramontini et Bernard Billicki, cf
http://www.officielkaratemagazine.fr/webzine/2012/10/karate-defense-training/).
Il propose ensuite (le temps est très court) la construction progressive d’un schéma type réactif, à base de percussions simples sur une attaque simple de type coup de poing direct ou crochet. Pendant le peu de temps disponible, le schéma type sera progressivement construit, de la parade réflexe initiale à la contre-attaque enchaînée, puis au retrait avec check à 360°, jusqu’à la nécessité de se désengager en faisant face à un deuxième adversaire…
Je ne rentre pas plus dans le détail de la progression et du contenu. Je propose plutôt de passer en revue ce qui m’a paru positif et ce qui m’a moins convaincu.
Les points positifs selon moi :• Un échauffement relativement original au début (à base de passes de rugby avec des cibles, C. Panattoni vient du Sud Ouest) et des étirements proposés à la fin : c’est anecdotique, mais pour une fois qu’on propose des étirements et qu’on sort des mêmes échauffements inadaptés, répétés sans raison logique depuis 40 ans ou plus dans beaucoup de dojos, ça me semblait mériter d’être signalé.
• Une réévaluation salutaire, surtout vis-à-vis d’un public majoritairement shotokan, de la distance de combat à travailler en situation : toutes les techniques présentées étaient à exécuter à très courte distance.
• Dans le même esprit, l’orientation claire vers un travail en avançant vers l’adversaire, soit en désaxement soit en rentrant dans l’attaque, mais en tous les cas en allant au contact.
• Un début de contextualisation des exercices, avec un début de jeu de rôle à remplir par le ou les agresseurs.
• Un rappel de la nécessité du check 360° à opérer autour de soi et de la nécessité de s’extraire du lieu de l’agression à la fin de l’engagement.
• Un travail intéressant sur des frappes « sans appel » à très courte distance avec coudes et genoux.
• Une invitation à travailler (en exercices de « flows ») la forme de corps sur des enchaînements courts à base de formes rondes et de frappes à très courtes distances, qui peuvent paraître à priori étrangères au Karaté (et plus proches de certains styles chinois) mais qu’on peut selon C. Panattoni retrouver même en Shotokan (dans certains katas avancés).
• De façon générale, le fait de s’adresser, dans un cadre FFKDA à un public de karatékas pour les inciter à faire la différence entre combats au dojo et combat dans la rue, et de proposer un certain type d’entraînement plus adapté à la réalité de la rue (ce qui, en soi, est déjà quasiment une révolution culturelle).
Ce qui m’a moins convaincu :• La proposition de parades/blocages dépendantes du type d’attaque : une réaction sur un crochet radicalement différente (dès le départ) de celle proposée sur un direct ; même si les deux techniques proposées sont chacune cohérentes, on reste dans l’esprit « si il fait ci, je fais ça », dont on sait qu’il reste en pratique largement aléatoire…
• Les précautions à mon avis excessives (pour des civils) prises quant à la riposte vis-à-vis d’une perspective judiciaire : pas de frappe préventive d’une part, mais surtout d’autre part la préconisation d’éviter la tête et de viser les masses musculaires, l’objectif recherché étant dès lors plus la paralysie temporaire des membres de l’agresseur. De mon point de vue, si on a déployé en vain toute une stratégie d’évitement et qu’on est contraint à l’engagement physique, il n’est clairement plus temps de tergiverser et, sans tomber tout de suite dans des techniques over-kill, on a quand même un peu de marge de manœuvre…
• La limite importante et peu réaliste, dans le travail face à plusieurs agresseurs (deux en l’occurrence), apportée par le fait que le second avait instruction de n’attaquer qu’une fois le premier neutralisé.
• Une affection visible du fondateur pour les clés, pourtant si difficiles à passer sous stress et en rapport de force défavorable, même s’il s’agissait certes de ne les passer qu’après une ou deux frappes.
• Un peu dans la même optique « boite à outils », l’illusion possiblement laissée sur le large panel des techniques utilisables (le corollaire en positif étant cependant la possibilité laissée à chacun de personnaliser).
• Surtout, l’absence de toute explication (en tout cas dans le cadre qui était le nôtre) des effets d’un stress massif et donc de la réduction de capacités à laquelle s’attendre en situation.
• Dans le même ordre d’idées, le niveau d’engagement très relatif des exercices proposés.
Au final, je suis évidemment personnellement resté sur ma faim et suis ressorti de là avec l’image évidente du verre que l’on peut considérer selon son point de vue à moitié plein ou à moitié vide…
Le grand intérêt à mon avis c’est qu’une micro-initiation comme celle-ci peut, compte tenu du public ciblé, l’aider à réaliser que le verre de karaté qu’il pensait plein pour la SD était pratiquement vide, et de le remplir déjà un peu…
Avec l’absence cependant de toute mise en perspective du combat sous stress en rapport de forces initialement défavorable, je me demande quand même si la moitié du verre dont j’ai trouvé qu’elle manquait n’est tout simplement pas la plus importante et de loin…
Cordialement,
Bomby