Salut
Je n'ai pas vu ce film, mais je ne vais pas tarder...
Mon petit vécu de situations de "catastrophes" (genre tempêtes de blizzard et pannes d'électricité au Québec qui durent une semaine, tempête de glace à Montréal, etc.) et le gros tas de recherches que j'ai faites sur le sujet depuis deux ans tendent vers un point commun :
Quand c'est la m*rde, genre catastrophe, bordel, etc, les gens qui le peuvent se remettent à coopérer, et ils sont HEUREUX de le faire.
Je pense réellement que c'est un trait commun à toute l'humanité, ça. La solidarité en temps de crise. Quand on peut aider on aide, et on est tous câblés pour aimer ça.
Quand on pense "Nouvelle Orléans", la plupart des gens pensent pillages, saccages, vols et viols. La vérité c'est qu'il y en a eu, mais qu'on n'a pas vu l'autre côté du phénomène, moins vendeur médiatiquement : les quartiers qui se sont regroupés et qui ont géré. Qui ont soigné leurs blessés, protégé les gamins, récupéré les petits vieux perchés sur leurs toits, et qui se sont organisés ensemble pour se protéger des quelques pillards qui traînaient. Des buildings ont fait de même, organisant la défense des points d'entrée, gérant la bouffe, l'eau, les soins, et même les loisirs, voyant que la situation se prolongerait...
Il faut clairement distinguer deux moments dans une catastrophe. Le "feu de l'action" où on n'a pas le temps ni les ressources pour protéger autrui, et "la durée".
Dans le feu de l'action, nos préoccupations se recentrent. Plus c'est chaud, plus on pense à son cul. Moins c'est chaud, plus on ouvre ses préoccupations vers l'extérieur :
- protéger tout le monde, si pas possible -->
- protéger ses potes, si pas possible -->
- protéger sa famille élargie, les gens de son propre sang, si pas possible -->
- protéger ses enfants, si pas possible -->
- sauver son propre cul
Grosso merdo, on fonctionne comme ça. Instinctivement. Si on peut on aide les autres, mais si c'est trop tendu, on sauve son cul sans réfléchir. Et ensuite on gamberge et on culpabilise toute sa vie. Il est extrêmement rare de voir des gens se sacrifier pour autrui, sauf s'ils ont le temps de prendre la décision, de peser le pour et le contre, et d'y aller.
En revanche, quand la temporalité est un peu plus longue, la vie se réorganise très vite autour d'une solidarité et d'une humanité souvent suprenantes.
Pour résumer, dans le scénario d'une tornade qui frappe et dévaste une ville, le mec lambda va se calfeutrer dans sa cave et serrer très fort les fesses, et il ne va sans doute même pas aller chercher son cousin qui est resté au rez-de-chaussée parce que s'il y va il risque fort de crever. C'est humain : chacun sauve son cul en premier. Et quand la tempête est passée, le même mec qui aura laissé son cousin crever parce qu'il n'avait pas trop le choix va sortir et commencer à soigner des blessés, libérer une fillette coincée sous une poutre, et éplucher des patates pour la soupe collective qui va s'organiser, et ça lui fera du bien de le faire. Il se sentira utile et heureux de participer.
Quant aux effets de groupe en huis clos... j'ai la chance de vivre avec une psy spécialiste des dynamiques de groupe à qui j'ai piqué quelques trucs
En général ça se termine par l'élection d'un "bouc émissaire". C'est triste, mais c'est toujours comme ça. Le groupe, pour renforcer ses valeurs et ses codes va choisir quelqu'un de "différent" et lui pourrir la vie. C'est lui qui devient, généralement, l'ennemi commun qui soude tout le monde, au final.
Si la pression sur le groupe est très forte, l'ennemi commun est "la pression"... et généralement le groupe est extrêmement soudé. Je le vérifie très très régulièrement en stages N2. Plus la météo est pourrie, plus l'ambiance est extraordinairement bonne. Idem quand je bosse avec des militaires qui ont un chef particulièrement con. Ils sont soudés, unis, et ils s'adorent... parce qu'ils détestent tous le chef. Etc.
Un groupe se définit par l'adversité. Dedans/dehors... et plus c'est la m*rde, plus les gens s'unissent contre la m*rde, pour gérer. On est câblés comme ça... sauf si l'urgence nous oblige à recentrer nos priorités, et à sauver notre cul in extremis.
Après, il y a environs 1% de la population pour qui ce que je dis là n'est absolument pas valable. 1% de la population dont la structure psychologique est perverse, de type psychopathique, etc. Et malheureusement l'ambiance paranoïde des discours "findumondistes" où on diffuse le message implicite qu'il va vraiment falloir se protéger parce qu'en cas de crise c'est "chacun sa m*rde" est très destructeur. D'une part parce que les gens qui choisiront de s'isoler pour se protéger voient leurs chances de survie diminuer fortement. D'autre part parce que ça fragilise le lien social, ça bouffe le tissus social, et ça construit littéralement des comportements de type paranoïdes où les gens vont, de fait, devenir comme ça alors qu'ils ne le sont pas à la base.
Est-ce qu'on peut négliger les 1% de furieux qui vont profiter de l'impunité pour piller, violer, saccager et détruire ? Non. Il faut se protéger d'eux.
est-ce qu'on doit fonder toutes ses stratégies de préparation sur eux ? Non. Ca serait inverser les priorités. Et de toute manière, on est beaucoup plus fort en groupe, s'il est question de se défendre contre une poignée de pilleurs.
Il est réellement, réellement important de comprendre les enjeux qui sont derrière tout ça.
Ciao
David