Salut
Je me permets d'intervenir dans ce post, c'est un sujet qui m'intéresse. Je plussoie Floproteus :
Petite parenthèse, l'ours n'est pas un prédateur pour l'homme. Si tu respectes quelques règles simples que tu trouveras sur le forum, tu ne risque pas grand chose. En Norvège, il y en a un qui est venu tourner autour de ma tente - car je n'avais pas respecter la première règle de sécurité - et j'ai simplement crié "go away" (en anglais, me demandez pas pourquoi ). Il est partie et je me suis rendormie.
Fin mars je pars pister les ours bruns en Slovénie, pour moi les choses sont claires :
- respecter l'animal
- rester humble
Pour ma part, j'ai fais quelques rencontres avec les ours noirs dans le nord du québec, et en ce qui concerne le bivouac, les seules fois où j'ai été réveillé par ces animaux, c'était au camp de base. Donc un endroit où tu peux difficilement enlever odeurs et attirances car c'est un camp sédentaire. Et les ours qui se sont rapprochés ont régulièrement fait des dégats (parce qu'aussi je n'avais pas entièrement respecté les consignes) seulement lorsque je n'étais pas là.
Pour les bivouacs, donc non sédentaires, j'avais deux techniques. La première consistait à éloigner tout ce qui était bouffe du tarp (je faisais un coin cuisine à un autre endroit au moment de poser le camp et laissait la nourriture à cet endroit). mettre la bouffe en hauteur n'est pas toujours évident (et j'ai vu que ça ne marchait pas forcément non plus). Comme cela, il y a moins de chance d'entendre un ours renifler le tarp durant la nuit. l'inconvénient, c'est que si un ours passe, t'as de bonnes chances de dire au revoir à ton stock ! . Ça s'était pour les sorties non lointaines.
pour les sorties plus lointaines, avec plus de km et d'autonomie, je préférais garder le sac de bouffe avec moi car je considérais que la perte de ma nourriture pouvait m'être préjudiciable loin de tout. Lors de ces sorties, je n'ai jamais été reniflé. Et si ca avait été le cas, ce n'était pas la fin du monde à mon sens. Il y a un monde entre renifler et venir te piquer ta bouffe quand t'es dans la même pièce ! L'ours est méfiant envers l'homme et ne va pas prendre de risques inconsidérés pour juste de la nourriture. les premières fois… Le problème avec l'ours est qu'il va prendre de l'assurance à mesure des rencontres. Le claquement de mains qui va le faire partir fissa le premier coup, il va le faire rigoler quand ça fait 5 fois que tu lui fais le coup
pas con l'ours. D'où les problèmes accentués sur les camps permanents. Mais pour une nuit, une bonne gueulante de dessous du tarp, ça va lui faire tout drole à l'ours :p
J'aurais voulu aborder un autre aspect de la vie avec les ours (mais qui existe avec tout être vivant) et qui ne concerne pas directement le bivouac. Je trouve cela important et peu mis en avant. C'est la communication non verbale lors des rencontres.
C'est rare de se trouver nez à nez avec un ours qui veut te croquer. Avant ça, normalement, tu vas l'entendre et le voir bien avant, et lui aussi. Si tu en es à te faire croquer, y'a de bonnes chances que tu ai raté un truc dans le dialogue qui va s'instaurer dès les premières minutes. Parce que oui, il y a un dialogue. Basé sur notre attitude, notre position, notre comportement. Les animaux sauvages connaissent parfaitement ce language universel, alors que nous avons tendance à ne plus le comprendre. Et pourtant nous continuons à le pratiquer (souvent inconsciemment). Regarder dans les yeux, fuir, avancer vers…, ce sont les messages non verbaux les plus évidents, mais il y en a des nuances. Je pense capital de réapprendre à « parler avec notre corps » si on veut comprendre comment les interactions se passent.
Et là, je vais préciser le « souvent inconsciemment » pour la pratique de la communication non verbale, car c'est une des plus grandes problématiques à mon sens. C'est bien de dire qu'il ne faut pas avoir peur de l'ours ou du loup, mais si une personne en a peur, ce n'est pas ça qui va la convaincre. Lorsqu'elle en verra un pour la première fois (et c'est quand même assez impressionnant comme bestiau), elle en aura peur. Et son corps enverra un message physique de cette peur. Tout comme celui qui rentre en forêt avec une arme, et qui, comme dit Killbith a conscience qu'il a un avantage certain avec son arme :
Et là, clairement, si tu as un equalizer tu risques de ne pas prendre le risque de vérifier s'il s'arrête à quelques mètres et perdre ainsi ton principal avantage.
On ne me fera pas croire qu'un homme armé envoie le même message non verbal qu'un autre qui ne l'est pas. je ne dis pas ça pour fustiger les gens armés, c'est un choix. Mais il faut comprendre je pense que cela joue sur le message envoyé. Et conséquemment, avec une arme ultime en main, tu n'es peut être plus dans la nécessité de dialoguer, vu que tu as « la solution ».
Tout ça pour dire que le comportement d'un animal va dépendre d'une manière importante de votre comportement et de votre état d'esprit. C'est assez drôle en fait car c'est exactement ce qui se passe entre humains. Je lis parfois la section « Survie en mileu urbain » et c'est un concept qui revient assez souvent. J'ai cru comprendre que la clé en self-defense, c'était ce qui se passait avant que ça parte en c*u!lle, désescalade, être le grey man, etc…. Si t'es au contact, c'est déjà trop tard. Ce qui m'étonne et me chagrine, c'est que pas mal pensent encore qu'en milieu sauvage, ce doit être différent. Et là, David l'a très bien dit dans un
autre fil:
Devant un ours vraiment vénère qui charge vraiment (ce qui arrive rarement, heureusement), le temps de réaction est extrêmement court. Ca cavale à 55-60 km/h ces trucs, ça commence par te percuter de front, ensuite ça freine en te marchant dessus, et ensuite ça se met sur toi et ça arrache tout ce qui dépasse... Moralité : l'ours on lui doit beaucoup de respect. Au pays des ours, on n'est PAS au sommet de la pyramide alimentaire, et donc oui on peut crever parce qu'un ours l'a décidé. C'est l'ordre naturel des choses, ça.
Mais avant qu'il soit vénère et qu'il charge, y'a surement moyen de faire de la désescalade et de ne pas provoquer son courroux.
Voilà, c'était pour apporter ma vision des choses.