Posté par survivalfred Salut,
Bon, malgré que mes théories stricto-sensus datent un peu et que de relire des briques de blabla psy me gave un peu parfois, je me permet d'intervenir ... et je vais essayer d'être clair et pragmatique, si, si
Je pense tout d'abord que le débriefing peut être mené de plusieurs manières, il y a la théorie et la pratique ... de plus le bébriefing est bien sûr différent suivant le trauma, qui est très différent lorsqu'on annonce une mort prochaine, donc là on débrief un événement encore abstrait et donc imaginé, ou lorsqu'on débrief un événement des plus concret puisqu'il vient d'arriver.
(PS: je sais tu ne débrief pas la mort, ou la maladie, en tant que telle, mais le "choc" de l'annonce ... c'est là que ça doit être difficile).
Je bosse avec le Dr Delatte, un psy bien connu justement dans le domaine du PTSD (post traumatic stress disorder), et on est vraiment d'accord à 100 % sur l'utilité du débriefing et de la prise en charge rapide des victimes, témoins et intervenants lors d'une situation "traumatisante" ou vécue comme telle.
Je dis vécue comme telle car une situation peut très bien être vécue (ressentie) comme "traumatisante" pas une personne et non par une autre qui en était témoin au même titre.
Le fait, de réaliser, de façon précoce, un débriefing permet déjà, primo, à la victime de se sentir reconnue comme telle ... ça c'est super important dans la pratique.
Deuxio, cela permet au patient de mettre des mots (entrer dans la symbolique) justement de façon précoce par rapport au faits et donc d'avoir le moins de chance possible d'y intégrer des éléments imaginaires, fantasmatiques ou pseudo-délirants par la suite.
Ensuite, cela donne une prise de contact avec un professionnel, et donc de démystifier le recours, a posteriori, à l'aide d'un psy ... ça fait encore peur à bcp de gens d'aller voir un psy : si on va voir un psy, c'est qu'on est "fou" ! Le patient reviendra plus facilement en consultation et avec déjà une certaine confiance envers l'intervenant, donc facilité de créer une relation thérapeutique.
Et en résumé, s'il y a débriefing, il y a prise en charge précoce et dans l'absolu c'est ça l'important, non ?
Enfin, ça permet pour les équipes de terrain de faire "le tri" entre les cas qui vont décompenser et ceux pour qui la situation sera moins problématique ... bon, parfois on se plante aussi :-/
Bon, pour être pragmatique je vais vous donner
un exemple, ça tombe bien j'ai été bosser ce matin et nous avons actuellement dans le service une dame qui illustre bien, enfin mal, mes propos (pardonnez moi si j'en parle de façon détachée mais je ne peux y mettre de sentiment, c'est mon boulot):
Madame X, mère d'une ado, divorcée, rencontre un nouveau petit ami ... quelques mois plus tard, du à l'alcoolisme et la violence de celui-ci, elle décide de le virer.
Le gars, s'arme d'un couteau et va chez Madame X avec la ferme intention de lui faire regretter leur séparation. Madame X est absente, pas de chance sa fille de 16 ans rentre à ce moment là, le type l'assassine et tente ensuite de se suicider.
Madame X rentre chez elle et tombe sur la scène.
Les faits se sont passer il y a déjà plusieurs années. Nous traitons madame depuis quelques temps pour troubles de la personnalité, auto-mutilation, anxiété, dépression ...
Madame n'a pas été suivie au moment des faits, elle n'a pas été considérée comme victime ... seule sa fille a été considérée comme victime (forcément, mais elle était DCD donc il n'y avait plus grand chose à faire).
La patiente a en plus développé un énorme sentiment de culpabilité : c'était son ex-petit ami, elle était probablement la cible, elle était absente etc ...
Je pense qu'un débriefing aurait pu lui permettre de sortir du piège "puisqu'elle n'est pas victime, elle doit forcément être responsable" ... "pourquoi ma fille et pas moi ?" > "je suis une mauvaise mère, je n'ai pas su protéger mon enfant" > "et pire c'est moi qui ai amené ce gars, je suis donc responsable" > " si je suis responsalbe je dois être punie" ... etc ...
Le travail avec cette patiente est beaucoup plus difficile a posteriori, il aussi fallu mettre en place tout le processus relationnel thérapeutique etc qui aurait déjà pu être initié lors des événements. Que de temps perdu puisqu'il n'y a pas eu de prise en charge précoce, que de mécanismes de défense mis en place avec le temps nous n'aurions pas du passer si l'action avait été réalisée plus tôt.
Bref, en conclusion, si Madame X avait été prise en charge rapidement, qu'un débriefing avait eu lieu et une prise en charge dans le continuum de celui-ci La situation aurait peut-être été différente.
Et, moi, ce matin, je n'aurai peut-être pas du soigner les 82 brûlures de cigarettes que Madame X s'est infligée sur la poitrine, les bras et la gorge cette dernière semaine ... :-?
Voilà, voilà, j'espère n'avoir pas été trop long ni confus ...
Fred
[size=9]PS : tiens, ça me fait un débriefing cathartique de ma journée[/size]