Je poursuis donc le fil de Thorgaal de mon coté, comme il l'a souhaité
Je raconte donc ici ce qui s'est passé de mon coté une fois seul
Je ne me souviens plus bien, mais en gros, ça donne à peu prêt ça :
Une fois seul je me suis rendu d'une chose, mon tempérament dépressif reviens vite une fois que les petits doutes de la vie de tous les jours reviennent, faute de l'avis d'un autre. Je me suis assez vite frotté aux questions du type : "Mais qu'est-ce que je fais, là?" "Où vais-je, pourquoi?". Bref, j'ai métaphysiqué pas mal
J'avais avec moi une carte du Sud de la France, et je décidais d'esquiver une grande plaine en la contournant par l'Est. Pour être exact, je pris la nationale en direction de Beley... grave erreur
Une ligne droite, où les voitures blindent comme pas possible. Je ne voulais pas faire demi-tour, le moral en aurait pris un sérieux coup et c'était pas le moment. Mais voilà, aucune échappatoire. La nationale courrait entre deux gros massifs montagneux, et aucune bifurcation en vue... Au bout de je sais pas combien de bornes, il me vient à l'esprit que si je ne parvient pas à me dégager de là je vais dormir à coté de la route
Je trace donc, de plus en plus vite, et je fini par trouver un gros sentier qui longe la nationale, un ruisseau et des pâtures. La situation s'améliore donc, et je prend finalement le temps de faire une rapide toilette à la rivière (j'étais franchement crade). Plus loin, je tombe sur une petite vallée qui, comme la nationale, se trouve prise entre deux massifs montagneux. A première vue, elle se dirige vers le Sud-Ouest. Ca me va, je pourrais ainsi rejoindre la vallée du Rhône (j'avais décidé y a un moment déjà de passer en Ardèche et non dans la Drôme).
Cette route fût une véritable bénédiction, car calme et le paysage était magnifique. Des bois, beaucoup, et des pâtures. Des belles pierres, des gens souriant... le bonheur
Alors que les deux premiers jours ne m'avaient réservé que de faibles dénivelés, le troisième me fit grimper par des routes et des sentiers tortueux. Je me dirigeait vers de le col de [je sais plus quoi] où j'espérais pouvoir passer de coté de la vallée du Rhône. j'y allais un peu au hasard de la boussole, en passant parfois par des petits sentier absolument merveilleux, entouré par une atmosphère humide et d'un rouge flamboyant. L'automne, là-bas, est vraiment superbe
Je ne croisais pas grand monde sur la route, mais le moral était remonté. Je me sentais bien.
Je finis par passer le col, et redescendre vers la vallée du Rhône. Là, un homme d'une cinquantaine d'année me propose de m'avancer, alors que je ne lui avait rien demandé. C'était un éleveur de moutons à la retraite, très sympa, avec ces tiques de langages dignes des dessins animés : "Ha p'tit ! t'as du caractère toi, j'taime bien ! tu sais moi j'suis parti d'rien, et beh j'ai eu une bonne vie. toi tu vas faire pareil, p'tit, t'as du caractère !"
Il me laissait finalement [je sais plus où] dans la grande plaine que j'avais voulu éviter. Là, c'est l'horreur, la vrai
Nul sentier, que des routes, partout. Des villages dans lesquels les hommes se barricades derrière des clôtures d'1m50 de haut, davantage destinées à protéger les passants des molosses qui se trouvent derrière, que leur propriété...
Je cherche désespérément un endroit où dormir, mais je me sens mal, cette région m'inspire la crainte et le dégoût. Alors que je marchais de nuit, sous la pluie, protégé par mon poncho, une femme d'une trentaine d'année s'arrête pour me prendre en stop. Une fois de plus je n'avais rien demandé, mais acceptais avec gratitude. Je lui expliquais que je cherche un bois où dormir, elle me dépose dans l'un d'eux.
Passent plusieurs jours, et j'arrive à Vienne. j'espère y trouver un cybercafé pour trouver du WWOOF (c'est Thorgaal qui a l'annuaire).
A quelques Km de Vienne, une voiture s'arrête à ma hauteur. Le conducteur me demande si je n'ai pas vu un vieux labrador noir, qui s'est échappé de chez lui. Je lui dis que non. Il me demande si je suis dans la galère. Je lui dis que non, que je vais à Vienne. Il me répond qu'il peut m'y emmener, qu'il repasse dans 15 minutes avec son camion pour le boulot, et qu'il m'y emmène si je le souhaite. J'accepte et le remercie. Le mec à l'air louche, et c'est tout de suite l'image d'un psychopathe qui me vient à l'esprit quand je pense à lui.
Je pose donc mon sac au rond-point sur lequel on s'est donné rendez-vous, et fais du stop en espérant que quelqu'un me prenne avant qu'il n'arrive. Personne ne me prend, et le mec m'amène donc à Vienne, juste devant un cybercafé. Avant de me déposer il me demande si je veux passer la nuit chez lui, le temps de faire une lessive, de prendre une douche et de manger copieusement. Je ne décline pas l'invitation, mais ne cache pas ma méfiance. Il me dit qu'il m'attendra vers 20H en face de la poste, et que je ne suis pas obligé de venir. Je ne suis toujours pas rassuré, mais je suis crade, mes vêtements aussi. Ca fait longtemps que je n'ai pas bien manger, et si je cherchais du WWOOF c'était justement pour me mettre au vert. Je décide de prendre le risque malgré tout.
Je passe donc l'aprem' dans le cybercafé, je note dans un calepin 13 adresses WWOOF en Ardèche, fais quelques courses et me rend devant la poste où j'attends. Là, un homme d'affaire, cheveux gominés, parfumé, mastiquant nerveusement un chewing-gum. Nous discutons un moment, et malgré l'air qu'il se donne, il se désole autant que moi -sinon plus- de la marche du monde. Il fait parti de ces gens qui subissent la vie dans cette société, mais qui, si l'occasion se présentait, participerait volontiers à son démantèlement.
Le mec se pointe, comme prévu. Nous nous rendons chez lui, en périphérie de Vienne. Il me parle tout le long du trajet de sa sexualité pour le moins libertine (boite à partouze, toussa
). Sa prose est ponctuée à intervalle régulier par des "Ha mais pas d'pitié quoi" (à prononcer avec un accent de vieil aristocrate pervers), en parlant des femmes qu'il a ou veut "tringler". Il n'a pas l'air dangereux, mais je me méfie.
D'autant plus qu'une fois arrivé chez lui, il me sert un copieux apéro à base de pastis. Au 3e je lui dis que ce sera suffisant pour moi. Lui continu, il en bois 5 en l'espace d'1/2 heure... Je découvre qu'il s'agit d'un alcoolique qui se justifie tant bien que mal pour se persuader qu'il ne l'est pas. Je lance une machine, prend une douche. A partir de là, il me fera des avances toute la soirée, sous plusieurs formes : "Mais pas d'pitié quoi, on est tous fait pareil [autre tic de langage], viens ! On se matte un porno" ; "Tiens je vais te montrer ta chambre, c'est aussi la mienne mais y a de la place" je lui répond qu'il n'y a qu'un lit, "Mais ! Deux places !". Je fini par obtenir de dormir sur le canapé du salon.
Le lendemain il me redépose à Vienne, sans qu'aucun incident ne soit à déclaré (Ouf!
).
De là je reprend la route et tombe rapidement sur un bar tenue par une jolie demoiselle (
). je m'y arrête pour lire le journal, et j'y passe finalement toute la matinée, et finis par y prendre mon déjeuner.
Après cela je ne me souviens plus trop, puis je me retrouver à la frontière entre l'isère et l'ardèche. Là je découvre qu'un vrai ciel bleu comme on n'en voit que dans le Sud, ça signifie des nuits où ça caille franchement. Les paysages sont sympa, les gens moins. les opportunités pour le bivouak sont limitées (j'ai dormi sur une table de pic-nique, le sol étant jonché de cannettes et autres déchets...), mais le moral tient le coup quand même.
J'arrive enfin en Ardèche ! Mais je perd mon poncho sur la route, et un vieil homme qui jardinait dans son jardin m'avais prévenu que la pluie était prévue pour le lendemain... Je me pose à un Kebab, dont la présence dans un petit village était étonnante, pour oublier mon malheur. Le patron me vois arriver en souriant, sa femme aussi. Il aime bien la rando, et me sort son sac 80L de l'armée. On discute un peu, m'invite à prendre une douche (y en avait une dans le kebab, qui était anciennement un appartement). Je lui demande s'il ne sait pas où je pourrais trouver un poncho, et il me dit qu'il connait justement un type qui tient un surplus militaire à une 20aine de bornes
Je me dirige à l'endroit indiqué, non loin du petit village de Lemps. Je fais du stop, à tout hasard, de peur que je ne parvienne pas à l'endroit indiqué suffisamment tôt pour trouver un lieu de bivouac par la suite. Une voiture remplie à ras-bord de jeunes babacools me proposent de me prendre, mais je ne sais pas bien où je trouverais la place de monter, et ils ne m'avanceront que de 2 km. Je les remercie et continu. Je me fait finalement prendre par un gars qui croit savoir où je vais, et fini par me déposer dans une ville à 10 bornes et 500m de dénivelé positif de mon objectif
. Il aura réussi à me faire perdre du temps, ce qui n'est pas vraiment l'objectif du stop... J'arrive au surplus militaire à la tombée de la nuit. Je suis accueilli par un gars super sympa qui, dès qu'il apprend que je vais dormir dehors, me propose le gite et le couvert
ca tombe bien, j'accepte. Je l'aide à charger son camion (il a une foire le lendemain), lui propose de l'aide pour la foire. Il accepte, et je resterais finalement chez lui pendant un mois
Pendant ce long mois, je travaillerais une semaine chez un de ses voisins chevrier, je l'aiderais pour les trucs de tous les jours (faire des colis, l'accompagner aux foires, la vaisselle, toussa), je glanderais pas mal aussi (en cause, un abus d'épices récréatives locales
), et je ferais l'étude attentive d'un manuel d'écologie destiné aux bac+5, qui se trouvait dans ses toilettes sèches, sous un bouquin de Chomsky
Il me déposera à Montélimar en voiture. De là je suivrait la départementale, en passant par le château de Grignan (très sympa, surtout l'équipe technique que j'ai croisé au café
), puis par Taulignan (le resto des artistes y fait de très bonnes pizza pour pas trop cher). C'est un super beau pays, où on peut couper à travers champs à volonté ou presque. De très belles pierres, encore, et surtout... des chênes verts, partout partout
Petit bémol, nous somme fin novembre, et ça caille pas qu'un peu, d'autant que la région est ventée
Je me dirige d'abord vers Dieulefit, mais rebrousse chemin vers Nyons (cyber, WWOOF, toussa) après avoir passé une nuit par trop froide dans une carlingue d'express
Arrivé à Valréas (15km de Nyons), je fumais une clope avant de faire du stop, quand un mec me fait signe, genre : "Tu fais du stop ?". Je lui répond par signe que oui, il s'arrête. C'est un guide naturaliste qui opère dans les Baronnies, on parle et il me dit qu'un de ses potes d'enfance est hôte WWOOF dans les baronnies, qu'il peut m'y emmener
Quelques péripéties plus tard, je me retrouve le soir même à une réunion très conviviale des guides naturalistes des Baronnies
Là j'apprend qu'il y a trop de neige, que je ne pourrais pas monter faire du WWOOF tout de suite. Mais le hasard est heureux, un éleveur présent à la réunion à besoin d'un coup de main pour quelques jours
Le cul bordé de nouilles, ouai
Je reste chez lui 3 ou 4 jours, c'est un mec dont la compagnie apporte le calme. Nous discuterons des heures durant, et j'apprendrais ce que c'est que la montagne caillouteuse avec de la neige
C'est casse-gueule : les cailloux glissent les uns sur les autres, le terrain est piégé de partout, la neige cache tout ça et l'inclinaison du sol en donne presque le vertige
J'ai a-d-o-r-é ! Et puis, les paysages...les paysages !
Après cela je monte chez Lucas, l'hôte WWOOF de tout à l'heure. J'y passerais environ 2 semaines avant de rentrer à Paris. Pour ceux qui font du WWOOF, sachez que Lucas Millot est un hôte extraordinaire. J'aurais passé les meilleurs moments de ce voyage chez lui, et je repartirais avec un ami en plus, et un vrai. De ceux qu'on aime et à qui on veut tout le bien du monde
Voilà pour ma part