Lundi 4 AvrilIl fait très froid ce matin. Une fois n'est pas coutume, on allume un bon brasier qui, dans la semi-obscurité de l'aube, doit être visible à des kilomètres à la ronde, mais comme il n'y a personne à des kilomètres à la ronde, on s'en fout, ça réchauffe!
(les enfants, ne faites pas pareil à la maison...)
Il faut préciser qu'autant nos sac de couchage sont très chaud (pour moi un ansabere 600), autant nos vêtements sont un peu limite pour rester immobile le matin (pour moi une petite veste polaire et un pull en laine).
Nous avons donc un peu de mal à nous détacher de ce bon feu, nous y grillons nos dernières châtaignes, et il est presque 10h lorsque nous nous décidons enfin à lever le camp...
Nous arrivons à Dornas par un étroit sentier mal entretenu : des arbres tombés le barrent en plusieurs endroit, contournés par de nombreuses pistes de sangliers qui semblent être les seuls à passer encore par là... il est pourtant approximativement balisé.
Il se transforme ensuite à l'approche du bourg en joli chemin empierré.
Nous trouvons effectivement une petite épicerie ouverte, nous y achetons de la farine pour faire des chapatis ainsi que deux ou trois extras (c'est Bambo qui a fait les courses, personnellement je suis contre les extras
)
Il nous reste encore à trouver de l'eau, nous en demandons à une bonne femme pas franchement commode qui nous regardent passer à la fenêtre, elle nous envoie son mari avec deux bouteilles pleines. Celui-ci nous tape un peu la discute, il voudrait nous offrir une bouteille de rouge, mais il n'est pas sûr que sa femme soit d'accord, il nous dit d'attendre. 10 minutes plus tard il n'est pas redescendu, sa femme a du avoir le dernier mot
Nous continuons.
La randonnée en Ardèche, c'est vite une routine : on monte sur une colline, on redescend dans un village pour traverser une rivière, et on remonte. Sauf que ce jour-là... c'est exactement ce qu'on a fait, mais en plus on s'est perdu dans les bois en remontant après Dornas
Après quoi on a rejoint le GR420 dans le but de le suivre jusqu'au pied du Mont Mézenc, point culminant de l'Ardèche et de la Haute-Loire.
En fin d'après-midi, nous descendons d'une colline par un sentier qui serpentent entre des genêts, et soudain, nouveau problème : Magnum a disparu, d'une part je l'aime beaucoup, mais c'est aussi très embêtant en terme de survie car il transporte mon tarp, ma popote et mon tapis de sol...
Je l'appelle un moment en vain, puis je fais demi-tour et je remonte la colline jusqu'au dernier point ou je me rappelle l'avoir vu derrière nous, il n'y est pas.
Il faut dire que quand il est détaché, il traine souvent de ci de là pour brouter un peu, puis il nous rattrape au galop, je redescends en cherchant attentivement où il a pu se tromper : à un endroit, le sentier se divise en deux bras qui descendent presque côte à côte, il a dû prendre le mauvais, des traces de sabots dans la terre meuble confirme qu'il est passé par là, j'accélère le pas. Arrivé en bas, toujours pas de Magnum, je l'appelle : un bêlement étouffé me parvient sur la gauche, je le retrouve enfoncé de trois mètres dans un mur de genêts impénétrables. Quand je l'ai appelé d'en bas la première fois, il a bravement essayé de couper dans les genêts, mais le Dog Pack s'est coincé à mort, il n'y a plus qu'à sortir la machette pour le sortir de là...
Avec toutes ces émotions, nous n'avons pas beaucoup avancé ce jour-là!
Le GR rejoint ensuite une route, ce qui ne nous simplifie pas la tâche pour chercher dormir.
Au lieu-dit Prabus, une vieille femme étonnée nous salue.
"On a vu de tout sur ce sentier : des ânes, des chevaux, des chèvres, mais des moutons jamais!"
Elle nous mets ensuite en garde contre le froid, et s'étonne que nos moutons soient déjà tondus :
"Chez nous, on ne tond jamais avant le mois de mai!"
Nous en prenons bonne note, mais nous continuons vers notre objectif, pour l'instant...
Le village de St-Andéol-de-Fourchades se profile devant nous, mais nous trouvons un petit coin tranquille juste avant (en fait dans les bois juste derrière le cimetière).
Ce soir-là j'expérimente les chapatis aux fourmis, c'est pas fabuleux au goût mais c'est très marrant à faire :
- former un chapati épais en pressant une boule de pâte entre vos paumes
- poser le chapati sur une grande feuille (charme, hêtre, érable...)
- poser la feuille avec le chapati sur une fourmilière (la feuille évite de coller tous les matériaux de la fourmilière sur le chapati)
- si nécessaire, exciter un peu les fourmis
- maintenant, le plus drôle : à l'aide d'une brindille, enfoncer dans la pâte toutes les fourmis qui passent sur le chapati
- replier le chapati, l'aplatir et recommencer autant de fois que vous le souhaitez
- cuire sur la braise quelques minutes de chaque côté
Ah... martyriser les fourmis, ça me rappelle mon enfance tiens, mais là ça se justifie, je fais ça pour manger